LA PEINTURE: "Des origines aux Impressionnistes"

 La PEINTURE: 

"Des Origines à l'Impressionnisme"

1.)- L'ANTIQUITE

Les premières manifestations de l'Art remontent à quinze ou vingt mille ans avant notre ère/. Dès l'âge de la pierre, l'homme a su tailler le silex, sculpter et graver des objets dans les cavernes, parfois il dessinait sur les parois des figures d'animaux, rennes, mammouths, bisons, et mêmes des figures humaines. Quelques-unes de ces images sont peintes en rouge, noir ou ocre. Les plus célèbres des cavernes ornées sont dans le Sud-Ouest de la France et le Nord de l'Espagne (Les Eyzies, Altamira).

Les Eyzies est une commune française située dans le département de la Dordogne,


en région Nouvelle-Aquitaine. Elle a été créée le 1ᵉʳ janvier 2019 sous le statut de commune nouvelle et regroupe les anciennes communes des
Eyzies-de-Tayac-Sireuil, de Manaurie et de Saint-Cirq.


La grotte d’Altamira est une grotte ornée située en Espagne à Santillana del Mar, près de Santander. 

Elle renferme l'un des ensembles picturaux les plus importants de la Préhistoire, le premier qui ait été étudié. Il date de la fin du Paléolithique supérieur, du Magdalénien.


Dans l'Antiquité classique, telle qu'on l'entend ordinairement, les peuples illustres par leur civilisation et leurs arts habitaient les rivages de la Méditerranée, tels les Egyptiens, les Phéniciens, les Grecs, les Etrusques, les Romains; les Assyriens, qui en paraissent éloignés, ont étendu quelques temps leur domination sur l'Asie antérieure. Si alors, la Méditerranée a servi de centre à la civilisation, c'est qu'elle offrait une voie de communication naturelle: les peuples fixés sur ses bords entrèrent en relation entre eux,  fondèrent des colonies sur des points éloignés de leur patrie, propagèrent leurs institutions, leurs industries, leurs arts. De là, des influences multiples et des analogies différentes.


L'Egypte

L'art de l'Egypte historique, celle des pharaons, commence vers l'an 4000 avant J-C. De 4000 à 3000 environ, fleurit l'Ancien Empire; de 3000 à 2000, le Moyen Empire est détruit par l'invasion des pasteurs du désert de Hyesos; puis, de 1700 à 1100, arrive le Nouvel Empire. Alors s'ouvre une longue période de décadence, interrompue seulement de 730 à 525, par une brillante renaissance sous les pharaons originaires de Saïs (Période saïte). 

En 525, l'Egypte est conquise par les Perses, en 332 par Alexandre, puis par les Romains, les Arabes, les Turcs, les Français et les Anglais.

Les Egyptiens considérant leurs maisons comme des lieux de passage et leurs tombeaux comme des demeures durables, l'art égyptien nous est surtout connu pour ses tombes. Les sépultures des riches sont ornées à l'intérieur de sculptures, de peintures et de bas-reliefs qui offrent une grande variété de sujets: la plupart représentent les victoires des pharaons, les cérémonies du culte, des scènes de la vie journalière ou du voyage de l'âme au pays des morts. Les fonds de paysage sont très fréquents; mais comme les Egyptiens ignoraient la perspective, leurs vues de campagnes ou de jardins s'étalent sur les parois verticales à la façon de cartes, sans raccourcis et sans différences de plans. La peinture égyptienne procède par tons francs qu'elle juxtapose: l'ensemble forme une décoration éclatante.


Toutes les figures qu'elle représente sont saisies de face: le sommet de la tête, la naissance du cou et le milieu du corps, sont sur un même plan vertical. Lorsque plusieurs figures sont groupées sur un même piédestal, les axes verticaux de leurs corps sont exactement parallèles. En second lieu, toutes les figures, immobiles ou en marche, reposent de tout leur poids sur la plante des pieds. L'artiste égyptien 
n'a jamais représenté un personnage portant sur une seule jambe et ne touchant le sol que du bout de l'autre pied.


Asie Antique

Dans les plaines des bassins du Tigre et de l'Euphrate, se sont développées deux grandes monarchies: au sud, la Chaldée avec Babylone pour centre; au nord, l'Assyrie avec Ninive. Rivales l'une de l'autre, elles ont eu chacune leur période de prépondérance: la Chaldée d'abord, qui plus tard, vers la fin du XIVème siècle, tomba sous la suprématie  de l'Assyrie.

Sans cesse mêlés, malgré leurs luttes, Chaldéens et Assyriens, ont confondu leurs civilisations, ou plutôt, l'Assyrie dut les éléments de la sienne à la Chaldée.


La Peinture chaldéo-assyrienne et les arts industriels

Les Assyriens n'avaient pas de pierre de taille; ils construisaient en briques leurs vastes palais qu'ils décoraient de sculptures et de peintures. 



La peinture se manifeste chez eux surtout sous la forme de briques émaillées, aux tons éclatants, qui forment sur les parois extérieures et intérieures des décorations d'un effet très original: des personnages, des animaux y sont représentés. Ces qualités de coloris, ils les appliquent encore à la fabrication et à la broderie d'étoffes et de tapis qui étaient partout recherchés: les traditions s'en maintiennent à Rome: au temps d'Auguste, on vante encore les tissus d'Assyrie. Sur les bas-reliefs, les rois sont représentés quelquefois avec des manteaux décorés de véritables compositions. Des meubles, des coupes, des armes richement ornés prouvent que les Assyriens n'étaient pas moins habiles à travailler le bronze et les divers métaux. Le commerce répandait au loin les produits de leur industrie; ils abondaient sur les marchés de la Syrie, de l'Asie mineure, dans ces pays où leurs rois faisaient sentir la force de leurs armes. Sur les rochers de ces régions, de grands bas-reliefs attestent encore ça et là le passage des guerriers d'Assour, tandis que les nécropoles se retrouvent les objets sortis de leurs ateliers. Du sud-est au nord-ouest, on peut suivre ainsi la marche de la civilisation assyrienne vers les contrées grecques.


Phénicie

Originaires des bords du golfe Persique, liés aux Chaldéo-Assyriens par
 une étroite parenté, les Phéniciens vinrent s'établir en Syrie vers le XXème siècle avant J-C. Dans cette région, longtemps fertile, les populations se pressaient nombreuses, dès l'antiquité la plus reculée; les Phéniciens durent se contenter d'une mince bande de terrain entre le Liban et la Méditerranée. Ainsi placés, ils touchaient à peine au continent et ne pouvaient se développer vers l'Est; mais à l'Ouest s'étendaient devant eux la mer, pleine de promesses. Ils lui demandèrent la fortune et furent longtemps les navigateurs et les marchands par excellence du monde antique.
Tant en Phénicie qu'à Chypre, les Phéniciens ont été, vers l'an 1000, de médiocres imitateurs des Assyriens. Vers l'époque de la Renaissance égyptienne, sous la dynastie saïte, ils ont imité les Egyptiens en même temps qu'ils imitaient les Grecs, sans rien y ajouter de personnel. Les oeuvres d'art figurent dans leurs articles de commerce. On peut leur reconnaître toutefois une certaine habileté dans la fabrication de verreries multicolores et de coupes gravées en métal; mais ces produits industriels, où les motifs sont d'inspiration étrangère, ne suffisent pas à constituer un art.
Ainsi, si l'on bfait abstraction de l'art infiniment ancien des chasseurs de rennes, le monde n'a connu, avant la floraison du génie hellénique, que deux grandes écoles d'art, l'une en Egypte, l'autre en Chaldée. La première exprima surtout l'idée de la durée, la seconde, celle de la force; il était réservé à l'art grec de réaliser l'idée de la beauté.



Grèce

C'est en Grèce que naît une civilisation européenne qui doit amener les formes d'art à une perfection encore inconnue jusqu'alors. L'art y apparaît tout d'abord imprégné d'influences orientales; les plus beaux objets, les plus riches étoffes sortent des ateliers de Tyr et de Sidon

Les ruines de Tyr (Liban)
Située sur la côte méridionale du Liban et à 83 km au sud de Beyrouth, la ville antique de Tyr fut la grande cité phénicienne qui régna sur les mers et fonda des colonies prospères comme Cadix et Carthage, et fut le lieu, selon la légende, de la découverte de la pourpre.
Château de la mer de Sidon (Liban)
Sidon ou Saïda en arabe est une ville du Liban. Elle fut dans l'Antiquité l'une des plus grandes villes de la Phénicie. Elle fut un temps incorporée dans le Royaume d’Israël du temps du roi David. La ville était construite sur un promontoire s'avançant dans la mer.


Dès le XVème siècle  avant J-C, les Grecs étaient en rapport avec l'Egypte, ainsi que l'attestent les monuments de Thèbes. D'autre part, à quelques heures de distance des côtes de l' Asie Mineure, s'étendaient de vastes régions où s'était implantée la civilisation assyrienne; quelques-uns des peuples qui y habitaient et qui se mêlaient aux Hell-ènes de la côte, les Lydiens, les Phrygiens, les Lyciens, ont ainsi servi d'intermédiaires entre la Grèce et l'Orient. Les légendes helléniques, celles de Cadmos, de Dardanos, etc... rappellent fréquemment ces influences étrangères. On ne devra donc pas s'étonner que l'art grec, à ses débuts, en porte également la marque. Toutefois, si les arts étrangers ont fourni aux Grecs des matériaux et des modèles, ceux-ci ne les ont pas acceptés distinctement; ils ne sont pas réduits aux rôles de copistes, et de bonne heure, à ce qui leur venait  du dehors, ils ont joint leurs inventions propres.

L'Art grec du VIII ème siècle au Vème siècle avant J-C

Du VIII ème siècle au Vème siècle environ, l'art grec traverse sa période d'adolescence: c'est ce qu'il est convenu d'appeler l'époque archaïque, d'un mot vague et qui s'applique ainsi à des oeuvres de date et de valeurs fort diverses. Dès lors, les centres artistiques sont aussi nombreux que les grandes cités elles-mêmes, et c'est tour à tour dans le Péloponèse, en Attique, à travers l'Archipel, en Asie, en Sicile ou dans le sud de l'Italie (la Grande Grèce) qu'il faut étudier les monuments qui ont survécu.

Sur les côtes de l'Asie Mineure, dans les douze villes de la confédération ionienne, à Milet, à Ephèse, à Chios, à Samos, etc..., la civilisation hellénique se développe avec éclat. A Ephèse, se dresse le sanctuaire de la confédération, le temple d'Artémis (VIème siècle), oeuvre de Chersiphron et de Métagène; à Chios, dès la fin du VII ème siècle, se perpétue toute une famille d'artistes habiles à travailler le marbre, et dont les plus célèbres furent Boupalos et Athénis; à Samos, au VII ème siècle, Rhoecos et Théodore découvrirent, disait on, l'art de fondre le bronze autour d'un noyau: grâce à eux se forma une école célèbre dont l'influence se fit sentir au loin. 
La Crète, île dorienne, est encore un des lieux d'origine de la sculpture grecque: là, travailla le fameux Dédale; et des maîtres crétois, sculpteurs en marbre, Dipoenos et Scyllis (VIème siècle), s'en allèrent exercer et enseigner leur art dans le Péloponèse. Ici que de villes, que d'écoles à citer! Corinthe qui, grâce à sa situation, était un fdes granbds entrepôts de commerce de la Grèce, contribue à fixer les règles de l'architecture. Tout près de là Sicyone est célèbre par ses sculpteurs; des Sicyoniens, Téléphane, Butade, s'il fallait en croire quelques légendes grecques,
 auraient inventé la plastique et la peinture. Dipoenos et Scyllis y fondèrent une école fameuse dont Canachos fut le meilleur artiste. A Argos, de l'atelier d'Agéladas sortiront Phidias, Myron et Polyclète. Près de la côte de l'Attique, à Egine, l'école de sculpture, dont les origines remontent à Smilis, est une des plus actives à la fin du VI ème siècle et au commencement du Vème; Onatas surtout est connu par son habileté à travailler l'airain, à composer des groupes de combattants. Plus à l'Ouest, Olympie, sanctuaire de Zeus, est un centre de la vie hellénique, grâce aux jeux qui s'y célèbrent. Ville sacrée, elle deviendra comme un vaste musée où se presseront les monuments de tous les arts.
Dans le Péloponèse, la métropole de la puissance dorienne et Sparte. Fondée par des guerriers, régie par des institutions qui visent à faire de tous les citoyens de vigoureux soldats, Sparte semble ne pas offrir aux arts un terrain favorable: Lycurgue a même été jusqu'à défendre de teindre les vêtements "parce que la couleur lui semblait propre à flatter les sens".

Dans la Grèce continentale, la grande cité ionienne, Athènes, va devenir le centre des arts. Sa situation même l'y prédestine. L'Attique ouvre sur la mer, vers l'Archipel, et de là, vers l'Asie, ses ports du Pirée, de Munychie et de Phalère, tandis que du côté de la terre les montagnes de l'Hymette, du Pentélique et du Parnès l'enserrent et le défendent. Au centre de la plaine se dresse le rocher sacré, l'Acropole, où Athéna et Poséidon se disputèrent le protectorat de la cité naissante. Nulle part l'esprit grec ne s'est manifesté avec plus d'éclat, de finesse, et de grâce. Au VI ème siècle, grâce aux institutions démocratiques établies par Solon, commence  la grandeur d' Athènes. Pisistrate, qui s'empare pour quelques temps du pouvoir, est épris de la gloire de la cité; il protège les lettres et les arts. Par ses soins sont recueillis et coordonnés les poèmes homériques; pour lui travaillent les architectes Antistates, Callaeschros, Antimachides, Porinos, qui commencent le  grand temple de Jupiter Olympien et qui élèvent le premier Parthénon, dont les débris se reconnaissent encore, encastrés dans le mur d'enceinte de l'Acropole. En même temps se développe la première école de sculpture attique avec Endoios, Antenor, Critios, Nesiotès, plus tard enfin Calamis, qui fut même le contemporain de Phidias, mais qui resta plus attaché que lui aux vieilles traditions. Délivrée de la tyrannie des Pisistratides, Athènes dirige l'héroïque résistance de la Grèce contre les Perses et acquiert sur le monde hellénique une suprématie que Sparte seule lui disputera. Ceux qui la gouvernent, aime, comme Pisistrate, les lettres et les arts. Cimon qui, de 471 à 449, dirigea presque constamment les affaires d'Athènes, protège Eschyle, dont la tragédie, "Les Perses", célèbre les victoires nationales; il fait élever le temple de Thésée, il attire à Athènes le peintre Polygnote de Thasos, qui retrace les vieilles légendes de la Grèce, les épisodes de la guerre de Troie. Celui-ci fut le premier, d'après Pline l'Ancien, à représenter les femmes avec leurs parures, leurs vêtements aux broderies brillantes, leurs coiffures variées. Il rompit l'immobilité et la rigueur des traits du visage, tradition de ses prédécesseurs; il ouvrit la bouche de ses personnages, sut les faire sourire.
A Athènes, aux grandes fêtes de la déesse nationale, les prix offerts aux vainqueurs étaient des vases dits "panathénaïques". Le commerce emportait au loin les vases grecs; beaucoup ont été retrouvés en Etrurie. Pourtant, au VIème siècle, on se contentait en général de détacher les figures en noir sur un fond rouge, et ce procédé même avait encore quelque chose de primitif et d'archaïque.


L'Art grec du temps de Périclès

Au Vème siècle, et surtout à Athènes, l'art grec atteint son apogée. Dans cette ville prospère et puissante, domine Périclès. Pour lui, tout doit concourir à la grandeur d'Athènes: armes et commerce, lettres et arts. Historiens, poètes, philosophes, savants viennent s'y établir.

Dans le domaine des arts, Phidias, né à Athènes vers le commencement du siècle, s'inspire de la pensée de Périclès et il l'âme de toutes les entreprises. Autour de lui se pressent des artistes d'élite: son parent, le peintre Panoenos, les architectes Ictinos et Mnésiclès, les sculpteurs Alcamène, Agoracrite, Colotès, etc... Périclès leur prodigue les ressources, et le peuple, chez qui le goût des arts  est comme un sentiment inné, les admire. Pourtant, dans les dernières années de leur vie, Périclès et Phidias connurent l'impopularité. Pour atteindre l'homme politique, on persécuta l'artiste.
La peinture est mal connue; on en est toujours réduit à quelques noms, à la mention d'oeuvres disparues. A la décoration d'un portique d'Athènes  (le Poecile), avaient travaillé, avec Polygnote, Micon et Panaenos. A côté d'épisodes légendaires on y voyait  la représentation d'évènements récents, tels que la bataille de Marathon. On ne saurait douter que là aussi de remarquables progrès ne soient accomplis, si l'on étudie les vases de cette époque. Aux figures noires sur fond rouge se substituent peu à peu les figures rouges sur fond noir mieux dessinées, et où le détail des traits et des draperies est indiqué avec plus d'exactitude et de finesse. 
Parmi les peintres céramistes, Epictétos, Sosias, Euphronios, Chachrylion, etc... ont signé des compositions, qui, par les conceptions et le style, sont dignes d'être attribuées au Vème siècle. Plus d'une fois, sans doute, ils se sont inspirés des oeuvres des grands maîtres de la peinture, qui ne nous sont pas parvenues.


L'Art grec après le Vème siècle

Vers la fin du Vème siècle un Athénien, Apollodore, a contribué à substituer à la grande peinture murale le tableau de chevalet et il est devenu célèbre par son habileté dans le jeu des lumières et des ombres. Les peintres du IVème siècle vont plus avant dans cette voie; ils créent l'illusion par leur science du dessin et de l'effet, ils séduisent l'oeil par le charme de leurs coloris. Zeuxis d'Héraclée, Parrhasius d'Ephèse, Apelle de Colophon, avec des nuances diverses, représentent en peinture les mêmes tendances que Praxitèle en sculpture. On racontait des merveilles sur leur habileté; Zeuxis avait peint une grappe de rfaisin que les oiseaux étaient venus becqueter; Parrhasius un rideau sur lequel Zeuxis lui-même s'était trompé et qu'il aurait voulu soulever. Si ces anecdotes sont vraies, elles prouves que ces maîtres excellaient dans l'art du trompe-l'œil.

Apelle étudia à Sicyone où existait alors une école de peinture célèbre. Pamphile, qui en était le maître, exigeait que ses élèves s'engagent à y rester dix ans. Ils devaient étudier la philosophie, l'histoire, les mathématiques, la perspective, etc... ; aussi les peintres qui en sortaient se distinguaient ils surtout par leur correction et leur science. 
Apelle y étaient encore quand Philippe de Macédoine le fit venir auprès dfe lui; il s'attacha ensuite à Alexandre et devint le peintre officiel de la cour: "Alexandre enfant, adolescent, homme et même dieu, Almexandre à cheval ou sur un char, couronné par la Victoire ou assisté par les Dioscures, sur son trône ou sur un champ de bataille, les compagnons d'Alexandre, ses chevaux, ses maîtresses, tels furent pendant le règne d'Alexandre ses sujets de prédilection. Quels contrastes avec les pagers grandioses et vraiment nationales que Polygnote traçait sur le Poecile et que Phidias sculptait sur le Parthénon!". Joignons y, les figures nues, les Grâces, les Aphrodites, les allégories; dans toutes ses oeuvres, fort nombreuses, se montre semble-t'il, un talent souple et gracieux, plein de finesse et d'habileté, mais qui manque de grandeur. Après la mort d'Alexandre, Apelle vécut quelques temps à Alexandrie, à la cour de Ptolémée, puis, chassé par les calomnies d'un rival, mourut dans l'île de Cos. Bientôt les peintres cultiveront le genre, mais la peinture est à la mùode: Zeuxis, Parrhasius se promènent vêtus de pourpre, une couronne d'or sur la tête; Apelle gagne une fortune, dit-on, avec un seul portrait.
(L'Acropole d'Athènes)

Les oeuvres de tous ces artistes ont disparu. Cependant, parmi les peintures murales d'Herculanum et de Pompéi, exécutées à la hâte par des artistes obscurs, il en est qui reproduisent certainement des compositions célèbres des maîtres du IVème siècle; ainsi l'Agamemnon se voilant la face, lors du sacrifice d'Iphigénie, oeuvre du peintre Timanthe, a été copié sur un mur de Pompéi. En outre, les vases peints donnent une idée exacte du goût et du style de ce temps. Les plus beaux sont ceux qui paraissent dater de la fin du Vème siècle et de la première moitié du VIème et où les traditions de l'époque antérieure se conservent encore en se mêlant aux tendances des écoles nouvelles; tels certains lécythes funéraires d'Athènes où sur un fond blanc s'enlèvent en traits rouges des figures d'une exquise beauté.
(Un lécythe Grec rouge)

Sur les vases à figures rouges, les représentations mythologiques sont toujours fréquentes; mais les divinités chères aux sculpteurs et aux peintres du temps, Dionysos et ses Satyres, Aphrodite et ses Amours, occupent la plus large place. 
On se plaît à reproduire les scènes de la vie quotidienne, et le luxe croissant des costumes, des tissus brodés, donne une idée de la civilisation raffinée qui s'épanouit alors. La technique même est plus riche: on applique sur les vases des couleurs nouvelles, parfois de l'or.
A partir du IVème siècle, l'art grec est en complète décadence. Pourtant, au moment où les Romains font la conquête de l'Orient, il se montre encore vivace et exerce sur eux une profonde influence. Bien des artistes grecs prennent le chemin de l'Italie où ils sont accueillis et admirés. Les maîtres forment  bientôt des élèves. Ainsi, l'art grec prend-t 'il  une nouvelle forme et se transforme-t'il en un art gréco-romain.



Italie

Après que l'empire romain eut conquis la Grèce, il adopta la civilisation du pays vaincu et la répandit à travers l'Europe. Mais Rome n'a pas attendu ce moment pour avoir une civilisation originale. La plus ancienne remonte aux Etrusques, formant vers le Xème siècle avant J-C une confédération puissante dans le centre de l'Italie. Pendant longtemps le peuple romain a donc emprunté ses arts, comme une partie de ses institutions, à l'Etrurie.


La peinture étrusque

C'est à l'intérieur des tombeaux et des tours surplombant qu'il est possible d'étudier la peinture étrusque. Il est intéressant de constater que l'influence grecque, cependant assombrie et assauvagie par le caractère étrusque qui se plaît aux scènes violentes, aux combats et aux massacres, prédomine. Les morts, par exemple, sont représentés se livrant dans l'autre monde aux joies de la table. C'est à Cerveteri, à Chiusi, à Vuici, à Orvieto, mais surtout à Corneto qu'ont été découvertes ces peintures. Dans ces mêmes tombes abondaient des vases peints dont la provenance grecque n'est pas douteuse, et à côté  s'en trouvaient d'autres, fabriqués dans le pays, où se voit l'effort de l'artisan étrusque qui imite lourdement les oeuvres étrangères. Ce même caractère d'imitation se traduit dans la décoration des miroirs, des cistes ou boîtes à toilette, dans les bas-reliefs qui ornent les sarcophages en terre cuite; parfois cependant les figures en ronde bosse placées sur le couvercle des sarcophages, par le type et par le costume, rappellent plutôt l'Asie. Les Etrusque étaient assez renommés comme sculpteurs de bronze, leurs villes étaient peuplées de statues: un général romain qui s'était emparé de Vulsinies fit transporter de cette ville à Rome deux milles statues. 

En fait, l'art étrusque est de valeur médiocre; mais ce qui en accroît l'intérêt, c'est que après avoir subi l'action de l'Orient et de la Grèce, à son tour il a exercé sur Rome une influence profonde.


La peinture romaine

Lapeinture romaine est mieux connue que la peinture grecvque, grâce aux découvertes faite à Rome aux thermes de Titus, au tombeau des Nasons, etc... et dans le Sud de l'Italie, à Pompéi, à Herculanum. A travers l'exemple de ces deux dernières villes, on peut voir qu'il n'y avait guère de maisons romaines appartenant à un bourgeois aisé dont les murs ne soient couverts de peintures. Aussi s'agot-il souvent d'oeuvres exécutées à la hâte,  par des artisans plutôt que par des artistes; les peintures murales remplaçaient alors le papier peint.


Beaucoup représentent des édifices de fantaisie, soutenus par de frêles colonnettes, et qu'anime la présence de quelques personnages. Ailleurs, ce sont des scènes mythologiques ou le peintre se content souvent de reproduire quelque composition grecque célèbre; /parfois des scènes familières, où des Amours qui jouent entre eux à cache-cache, qui travaillent à divers métiers, cordonniers, menuisiers, marchands, etc... L'artiste ne songe pas à emprunter des sujets à l'histoire de Rome ou de l'Italie; il puyise à pleine mains dans le répertoire grec, sans autre souci que d'égayer les yeux par de riantes images. Les peintures sont souvent exécutées d'après les procédés de l'encaustique qui consistaient à délayer les couleurs dans de la cire fondue et à les faire mieux pénétrer dans l'enduit du mur par l'action du feu.

A côté de ces peintures anonymes, on en pourrait citer d'autres dont on ne connaît que les noms; mais la plupart de ceux dont parlent les écrivains latins sont des Grecs. Les Romains forment l'exception; cependant, dès l'époque républicaine, un patricien, un Fabius, l'historien de la seconde guerre punique, n'avait pas dédaigné d'exercer la peinture, ce qui lui avait valu le surnom de "Pictor (peintre)". Parfois ces artistes reproduisaient des épisodes des guerres de leur temps, et on vit même des générazux vainqueurs se tenir sur le Forum à côté des tableaux de ce genre pour expliquer leurs exploits de la foule.

Dans la décoration de leurs monuments et de leurs maisons, les Romains ont fait aussi un fréquent emploi de la mosaïque, déjà connue des Grecs, et,  aux cubes de marbre et de pierre de diverses nuances, ils mêlèrent des pâtes de verre colorées. Ils s'en servirent surtout pour les pavements, mais parfois ils l'appliquèrent aux murs. Parmi les mosaïques anciennes très nombreuses qui nous sont parvenues, beaucoup sont fort simples et ne présentent pas des ornemznts; mais il en est o^se déroulent de grandes compositions. Un des exemples les plus remarquables qu'on puisse citer est la mosaïque conservée au musée de Naples, sur laquelle est retracée la bataille d'Arbèles.


Persistance des traditions de l'Art antique

L'histoire de l'Art antique ne se termine pas avec la chute de l'empire d'Occident. De même que les traditions et les institutions romaines se maintiennent, en se combinant avec des éléments nouveaux, à travers tout le Moyen Âge, de même les influences artistiques se perpétuent et apparaissent souvent avec une remarquable évidence. 


En Orient, l'art byzantin s'inspire plus d'une fois de l'art hellénique; en Occident, les monuments romains, par leur grandeur et leur force, étonnent les imaginations. Longtemps von les imite avec plus ou moins d'habileté: l'église chrétienne dérive en partie de la basilique ancienne; l'art roman, son nom même l'indique, est fils de l'art romain. Même dans l'art gothique, qui paraît rompre avec ces traditions, on pourrait signaler plus d'une fois les réminiscences antiques. Puis, au XVèmes et au XVIème siècles, les artistes se reportent vers l'Antiquité, avec un enthousiasme parfois excessif; l'étude et l'imitation du passé deviennent pour beaucoup une référence. Longtemps l'art romain a bénéficié presque seul de ce culte, avant que l'art grec ne soit réhabilité.



2.)- Le Moyen-Âge

L'Art chrétien

Le terme "art chrétien" convient à proprement parler, à toutes les manifestations de l'art depuis les premières peintures des catacombes de Rome jusqu'à nos jours, dans les pays où le christianisme a prévalu.


Toutefois l'usage s'est établi de réserver la désignation d'"ancien art chrétien" à celui de l'Occident chrétien jusqsu'à Charlemagne, après lequel commence "l'époque romane"; on appelle "art byzantin", celui de l'Orient chrétien, depuis que Byzance devint capitale en 330 après J-C, jusqu'à la prise de Constantinople, ezt même au-delà. Il existe tris centres artistiques principaux: Rome, Ravenne et Constantinople.


L'Art Chrétien en Occident

Au fond des nécropoles, la peinture chrétienne a pris naissance dès la fin du 1et siècle. Les formes en sont souvent symboliques ou allégoriques; le poisson est l'image du Christ, la colombe est l'image de l'âme du fidèle. bien qu'il faille se garder de chercher dans les moindres détails la trace d'un mysticisme compliqué. Dans l'Ancien et le Nouveau Testament, l'artiste choisit aussi les sujets qui lui paraissent le mieux se rapporter aux dogmes les plus importants et les plus populaires du christianisme: Noé, dans l'arche, rappellera la Rédemption; Jonas, qui passa trois jours dans le ventre d'un monstre marin, la Résurrection. Aussi, sur les parois des catacombes, rencontre-t'on les mêmes compositions sans cesse répétées: Adam et Eve, Noé dans l'arche, le sacrifice d'Isaac, Moïse frappant le rocher dans le désert, l'histoire de Jonas, Daniel dans la fosse aux lions, les miracles du Christ, le bon Pasteur. Chaque peinture est un enseignement moral qui, par les yeux, s'adresse à l'âme; du reste, nulle préoccupation historique dans le choix et  dans la disposition des sujets. Si l'on rappelle sans cesse l'intervention salutaire du Christ, on ne retrace jamais encore sa Passion, non plus que les souffrances des martyrs.

Par le style, ces peintures ne diffèrent pas de celles qu'exécutaient alors les artistes païens; les procédés sont les  mêmes, et souvent les peintres chrétiens avaient fait leur éducation dans les ateliers profanes. De là ces figures allégoriques, ces bucranes, ces masques, tous ces ornements qu'on retrouve de part et d'autre, et auxquels on n'attachait pas de signification religieuse. Même certains sujets sont tout à fait profanes, mais deviennent chrétiens par le sens qu'on leur donne: Orphée, charmant les animaux aux sons de sa lyre, est l'image du Christ et de son action bienfaisante. Dès l'origine, la peinture chrétienne a ses conceptions propres qu'elle tend à revêtir de formes de plus en plus personnelles.

Transformation de l'Art chrétien au IVème siècle. La Basilique

Au commencement du IVème siècle, la situation nouvelle que Constantin assura au christianisme modifia les destinées de l'art comme celle de la société. Désormais, le culte s'exerça en plein jour, dans de vastes édifices. Les églises ou les basiliques, par leurs dispositions, rappelaient à la fois les basiliques profanes, les maisons des Romains et l'architecture des catacombes.


Pour décorer ces grands édifices, les peintures des catacombes ne pouvaient suffire. Les sentiment qu'elles exprimaient ne répondaient plus d'ailleurs à la situation de la nouvelle société chrétienne; rattaché plus étroitement à la terre, transformé en puissance politique, le christianisme, dans ses arts, devait faire une part plus large à l'élément historique et en même temps s'attacher à exprimer les idées de grandeur et de domination. Ces tendances se manifestent partout. On veut connaître les traits du Christ, de la Vierge, des Apôtres et, si les documents authentiques manquent, on en invente, on crée des types qui, en se propageant, acquièrent en quelque sorte un caractère officiel. On se plaira bientôt à représenter le Christ, non plus sous les humbles traits du bon Pasteur, mais comme un monarque oriental, assis sur le trône, escorté d'une cour d'anges. D'autre part, aux sujets traités et groupés d'après des conceptions symboliques, on substitue des séries historiques de l'Ancien et du Nouveau Testament, et plus tard, en reproduisant des scènes de martyre, on glorifie le passé de l'Eglise.

Ainsi, au IVème siècle, tandis que les peintres des catacombes et les sculpteurs de sarcophages restaient encore fidèles aux traditions, les artistes chargés de la décoration des basiliques créaient peu à peu un nouveau style. Les peintures qu'ils exécutèrent ne nous sont pas parvenues; mais, en même temps que la fresque, ils employaient aussi la mosaïque; ils en couvraient parfois les parois des murs, le fond des absides, et lui donnaient ainsi une grande importances. Plusieurs églises de Rome ont conservé des mosaïques des IVème, Vème et  VIème siècles; telles sont celle du mausolée de Constance, des églises  de Sainte-Pudentienne, de Sainte-Marie-Majeure, des saints Cosme et Damien, etc... , où se manifestent ces caractères.

Cependant l'art s'affaiblissait en Occident, sous l'influence des évènements qui amenèrent la ruine de l'empire et l'établissement des royaumes barbares. Les monuments étaient plus grossièrement construits, les figures des fresques et des sculptures plus lourdes et plus gauches. A partir du VIème siècle, en Gaule comme en Italie, il faudra attendre de longs siècles avant d'assister à une véritable renaissance des arts.


L'Art Byzantin

Tandis que l'empire d'Occident disparaissait, l'empire d'Orient se maintenait et son existence devait se prolonger jusqu'au XVème siècle, à travers des alternatives de grandeur et de décadence. Là s'épanouit encore une civilisation brillante dont l'influence s'exerça au loin. Constantinople en était le centre; au fond de l'Orient comme de l'Occident circulaient de merveilleux récits sur sa splendeur; les étrangers, marchands, artisans, aventuriers y affluaient du monde entier, et, par sa situation même, elle semblait destinée à servir de trait d'union entre l'Asie et l'Europe. Tel est aussi le caractère de l'art byzantin; aux anciens éléments helléniques il mêle les éléments orientaux, mais il sait se montrer en outre créateur et revêtir une physionomie originale; jusqu'au XIIème siècle, il sera l'art chrétien par excellence. Au VIème siècle déjà, sous le règne de Justinien, il est composé avec quelques-uns des caractères qu'il conservera toujours. Au VIIIème siècle, de graves dangers le menacent: c'était surtout au service de la religion qu'il s'était développé; or, plusieurs empereurs, qui s'occupaient de réformer tout à la fois l'Eglise et l'Etat, proscrivirent les images sacrées comme entachées d'idolâtrie. La querelle des iconoclastes, qui commença vers 726, ne se termina définitivement qu'en 842, par le triomphe du culte des images. Il se trouva que l'art avait plutôt gagné à ces épreuves. Les peintres religieux, loin de céder devant les menaces, avaient travaillés avec obstination; mais à côté d'eux, s'était formée une école plus indépendante et qui paraît s'inspirer avec une ferveur nouvelle des modèles antiques. Aussi, depuis le milieu du  IXème siècle jusqu'au XIème, tandis que les princes de la maison macédonienne assurent la prospérité de l'empire, l'art fleurit dans tout son éclat. Au XIème siècle, il commence à faiblir; il devient plus raide, plus monastique, et tend souvent à s'immobiliser dans la tradition. Les malheurs qui, pour l'empire grec, signalèrent le XIème et le XIIème siècle, la fondation éphémère de l'empire latin au XIIIème siècle, eurent leur contrecoup sur l'art; si, dans la suite,  quelques efforts furent tentés pour lui donner une vie nouvelle, le succès en fut restreint. Cependant, il a survécu à l'empire même, et il a retrouvé un asile dans les monastères, surtout au mont Athos,

(Le mont Athos, Grèce)


où, de nos jours, il agonise lentement. Si les plus anciennes peintures des églises byzantines ont disparu, en revanche, pour le VIème et le VIIème siècle, il reste un certain nombre de mosaïques. Sainte-Sophie en était entièrement décorée: sur un fond d'or ou de bleu foncé se détachaient des compositions sacrées et de grandes figures d'anges et de saints; la plupart ont été ruinées ou couverte de badigeon par les Turcs, qui ont transformé l'église en mosquée.

Ravenne, alors la capitale de l'Italie byzantine,

RAVENNE, (Emilie-Romagne, Italie)
possède plusieurs églises de cette époque qui conservent en partie leur ancienne décoration. Une des plus intéressantes est celle de Saint Vital, contemporaine de Sainte-Sophie: parmi les mosaïques du chœur, il en est deux qui représentent Justinien et Théodora, entourés de personnages de leur cour et offrant des présents à l'église. En général, les sujets ont un caractère plus exclusivement religieux., la plupart sont empruntés aux livres saints. Dans ces vastes compositions les artistes byzantins cherchent surtout la symétrie et ils ont un sentiment fort juste de la décoration. On peut consulter encore les miniatures dont ils ornaient les manuscrits; celui de la Genèse conservé à Vienne, ceux de Josué, de Cosmas Indicopleustès au Vatican en offrent de beaux exemples. Un manuscrit syriaque, exécuté en 586 et qui se trouve à la bibliothèque Laurentienne de Florence, contient la plus ancienne représentation de la crucifixion.

Dans la période qui suit les iconoclastes, les miniatures acquièrent une importance d'autant plus grandes qu'elles sont souvent les seuls monuments qui restent de la peinture. Quelques-unes attestent une influence fort vive dans l'art antique. Ce n'est pas un fait qui doive surprendre: depuis le IVème siècle, Constantinople s'était peuplée de statues enlevées aux temples païens, et d'ailleurs l'action des traditions antiques avaient dû se maintenir dans les ateliers, bien que modifiée et altérée. Sans doute, dès le Vème et le VIème siècle, si on étudie l'ornementation byzantine, apparaissent des motifs dont l'origine orientale est évidente; mais, comme les anciens Grecs, les artistes byzantins recherchent la grandeur et l'harmonie dans l'ordonnance des compositions, la noblesse des attitudes, l'élégance des draperies; ajoutons aussitôt qu'à tous égards ils restent toujours bien loin de leurs modèles. Dans la seconde moitié du IXème siècle et au Xème siècle, il semble qu'il ait existé une école qui voulût se rattacher plus étroitement encore à l'art antique. Nulle part, cette tendance n'est plus évidente que dans un psautier grec du Xème siècle, conservé à la Bibliothèque nationale de Paris: David, le roi biblique, s'y montre sans cesse escorté de figures allégoriques qui paraissent empruntées à l'Olympe hellénique. Cependant  cette invasion de la mythologie dans l'art chrétien, si elle  ne fut pas entièrement repoussée, fut du moins contenue: la plupart des manuscrits ont une physionomie plus religieuse et on y peut étudier surtout la constitution définitive de l'iconographie byzantine. Tel est, le magnifique ménologe de l'empereur Basile II (976-1025), à la Bibliothèque vaticane, qui contient quatre cents miniatures, signée par huit artistes. Dans plusieurs manuscrits du XIème siècle, le style est déjà moins libre, le dessin moins correct; ainsi commence une décadence qui s'accentue par la suite.


Les peintres du mont Athos

Au XIIIème et au XIVème siècles, les Paléologues, qui cherchèrent à relever l'empire, encouragèrent les arts. La peinture, presque exclusivement monastique, fut surtout cultivée au fond des couvents de l'Athos

; là travailla, peut-être vers cette époque, Manuel Pansélinos, considéré dans la suite comme le maître par excellence. Un de ses admirateurs, le moine Denys, écrivit un "guide de la peinture" dans lequel il enseigne non seulement les procédés techniques, mais encore les compositions qu'il faut adopter pour les sujets sacrés.
Ce manuel commode, qui dispense de chercher et d'inventer, eut une grande vogue dans les ateliers monastiques, et pour beaucoup d'artistes la peinture ne fut plus qu'un métier mécanique. Les couvents de l'Athos sont décorés de fresques de cette dernière période: quelques-unes remontent peut-être au XIVème siècle; d'autres, au contraire, sont d'hier; toutes, du reste, se ressemblent. Dans ces oeuvres de décadence, si l'exécution est souvent médiocre, l'entente de la décoration est encore grande. C'est par là qu'il faut juger l'art byzantin de cette époque, et non par ces petits tableaux, de date incertaine, de valeur souvent faible, qu'on rencontre dans les musées d'Occident.

L'influence byzantine en Occident

L'art byzantin a exercé de toute part une puissante influence. Entre l'Occident et l'Empire Grec, les relations politiques et

(Citadelle Palatine -Palerme)
commerciales étaient fréquentes: de là vinrent les relations asiatiques. En Italie, si même on laisse de côté Ravenne dont il a déjà été parlé, la domination ders empereurs de Constantinople s'est longtemps maintenue dans le Sud, et la civilisation byzantine y était si florissante que les princes normands, quand ils firent la conquête de ces pays, au XIème siècle, n'essayèrent pas d'abord de la détruire. En Sicile, des Byzantins, au XIIème siècle, décorent de mosaïques la citadelle Palatine de Palerme, le dôme de Cefalu, Sainte-Marie de l'Amiral, etc...


et les artistes du pays qui travaillent avec eux sont leurs disciples et leurs imitateurs. Près de Naples, au mont Cassin, l'abbé Didier, vers le milieu du XIème siècle, avait fait venir à Constantinople des mosaïstes et des sculpteurs. A Rome, bien des mosaïques du XIIème et du XIIIème siècles se rattachent à l'influence des maîtres grecs. Enfin Venise est braiment une ville byzantine; sans cesse en rapport avec l'Orient d'où elle tire sa richesse et sa puissance, elle emprunte à Constantinople ses industries et ses arts. Saint-Marc, commencée au Xème siècle, est une église grecque, par la construction et la décoration. 
En France, l'influence byzantine ne s'est jamais exercée d'une façon aussi sensible et aussi durable que dans certaines régions de l' Italie.




L'Art Roman

A la fin du VIIIème siècle et au commencement du IXème, quand Charlemagne essaya de reconstituer tout un immense empire, il voulait aussi relever les arts de l'abaissement où ils étaient tombés. Il chercha des artistes à l'étranger; il en fit même venir, d'après un de ses biographes, des pays au-delà de la mer. Cependant on a quelquefois exagéré les emprunts qu'il aurait fait à Byzance. De grandes constructions furent entreprises à Aix-la-Chapelle, résidence ordinaire de l'empereur, que les contemporains appelaient "la nouvelle Rome".
La basilique d'Aix-la-Chapelle

Le dôme d'Aix-la-Chapelle subsiste encore, bien que modifié et restauré: ce n'est pas une basilique latine, mais un édifice circulaire qui rappelle ceux de l'Italie et de l'Orient. En même temps s'élevaient des palais; dans celui d'Ingelheim, la décoration attestait la puissance des souvenirs antiques: on  y avait représenté Ninus, les grandes actions de Cyrus, les cruautés de Phalaris, les conquêtes d'Alexandre, Annibal, des épisodes de la vie de Constantin, de Théodore. Nous ne pouvons juger aujourd'hui de la peinture carolingienne au VIIIème et au IXème siècles que par les manuscrits à miniatures: quelques-uns, il est vrai, ont une grande importance, comme l'évangéliaire de Charlemagne, exécuté par le peintre Gondescale, la Bible offerte à Charles le Chauve par les moines de Saint-Martin de Tours, le sacramentaire de Dogon, la Bible de Saint-Paul-Hors-Les-Murs à Rome, décorée par le moine Ingobert, etc... Dans les provinces, les évêques étaient invités à imiter l'empereur, à réparer les anciennes églises, à en construire de nouvelles. Cependant les efforts tentés par Charlemagne pour provoquer une renaissance n'aboutissaient guère. A peine est-il mort qu'on voit son oeuvre s'effondrer; les luttes de ses successeurs, l'établissement du régime féodal, les invasions normandes sèment partout la désolation.
Le Xème siècle est l'un des plus sombres du Moyen Âge, peut-être en raison de la croyance du monde occidental convaincu de sa fin prochaine avec l'avènement de l'an mille.
En tout cas, au XIème siècle, une vie nouvelle semble circuler. De tous côtés ont lieu de grandes assemblées où les évêques et les abbés prêchent la paix, puis la trêve de Dieu. L'état de la société s'améliore, l'âme s'ouvre aux grandes espérances, un autre Moyen Âge commence: avant la fin du siècle, les trouvères chantent la "chanson de Roland", les croisés prennent la route de Jérusalem, le mouvement communal éclate ça et là, et, au milieu de ce réveil général, les arts se relèvent. "Aux environs de l'an 1003, dit le chroniqueur Raoul Glaber, dans tout l'univers, mais surtout en Italie et en France, on se met à reconstruire les églises."

Les écoles monastiques; l'ordre de Cluny

L'abbaye de Cluny
Les arts renaissent d'abord sous l'influence monastique. Entre tous, un ordre religieux les cultive et les propage, celui de Cluny, fondé au Xème siècle, et qui, au XIème siècle, multiplie ses monastères dans toute l'Europe. Les abbés de Cluny sont de véritables souverains, conseillers des papes et des rois, et leur abbaye est la plus vaste de la chrétienté. 
L'église de Cluny, reconstruite de la fin du XIème siècle au commencement du XIIIème siècle, avait 171 mètres de long: la moderne Saint-Pierre de Rome n'a que 12 mètres de plus. Les Cisterciens, qui réagiront contre le luxe des églises clunisiennes, seront cependant, eux aussi, d'excellents architectes. Les artistes qui citent les contemporains étaient en grande partie clercs ou moines: ainsi Gauzon et Hézelon qui, au XIème siècle, fournirent les plans de la nouvelle abbaye de Cluny; Jean, architecte vde la nef de la cathédrale du Mans; Raymond Gayrard, à qui on attribue le chœur de Saint-Sernin de Toulouse, etc...
Il s'en trouvait aussi qui composaient des manuels techniques à l'usage des artistes: tel fut le moine Théophile, qui vécut probablement au XIème siècle et en Allemagne; sa "Schedula diversarum artium" traite des procédés de la peinture, des vitraux, du travail des métaux et de l'orfèvrerie. Certains monastères étaient de véritables écoles de beaux-arts. Ainsi, en 1094, Bernard, ex-abbé de Quincy, avait fondé près de Chartres un monastère du Saint-Sauveur où étaient réunis des sculpteurs, ders orfèvres, des peintres.



La peinture: fresques, miniatures, peinture sur verre

Saint-Savin sur Gartempe, la sixtine romane du Poitou
De tous les arts, la peinture est, à l'époque romane, la plus pauvrement représentée en France. Peu d'églises ont conservé l'ensemble de leur décoration peinte: Saint-Savin, près de Poitiers, est, à cet égard, une exception. Dans les manuscrits, si les lettres ornées charment souvent par une ingénieuse fantaisie, les figures sont, en général, incorrectes et mal groupées. En revanche, dans le domaine de la peinture, a pris naissance un système de décoration qui bientôt a créé de véritables chefs-d'oeuvre. On connaît depuis longtemps les verres colorés en pâte appliquée à la fermeture des fenêtres, mais on ne sait pas peindre sur verre avec des couleurs que la fusion fixe ensuite définitivement sur le fond en vitrifiant. Au Xème siècle seulement on voit apparaître avec certitude ce procédé, et on sert à la fois de verres teints dans la masse (rouge, bleu, jaune, violet), et d'une couleur d'émail brun appliquée. Les pièces de verre découpées sont réunies par des verges de plomb. Dès lors on couvre les vitraux d'ornements, de figures, de compositions, et la peinture sur verre se développe rapidement. Au XIème siècle, le moine Théophile en décrit les procédés dans sa 
"Schedula diversarum artium": à Angers, à Saint-Denis, à Bourges, au Mans, etc..., subsistent encore quelques vitraux du XIIème siècle. Sur un fond de couleur se détachent des médaillons historiés; les tons offrent déjà des qualités de chaleur et d'harmonie remarquables.
Cependant les progrès même des arts, le luxe qui s'épanouit alors dans les églises alarment les esprits austères. Saint-Bernard, dans une de ces lettres, condamne avec véhémence "la hauteur immense des églises, leur longueur extraordinaire,  l'inutile ampleur de leurs nefs, la richesse des matériaux polis, les peintures qui attirent le regard". Après avoir signalé le luxe des pièces d'orfèvrerie, il ajoute: "O vanité des vanités! mais encore plus insensée que vaine. L'église brille dans ses murailles, elle est nue dans ses pauvres; Elle couvre d'or ses pierres et laisse ses fils sans vêtements". Il s'irrite surtout contre ces animaux étranges partout sculptés sur les frises et les chapiteaux, car "telle est la variété de ces formes fantastiques qu'on a plus de plaisir à lire sur le marbre que dans son livre, et qu'on aime mieux passer le temps à les admirer tour à tour qu'à méditer sur la loi de Dieu". Aussi toute décoration trop riche et exclue des sévères églises cisterciennes. Mais les rigoristes ne forment qu'une minorité, et Suger exprimait mieux l'opinion générale: "Que chacun pense sur ce point ce qui bon lui semble. Quant à moi, j'avoue me complaire de cette opinion que plus les choses sont de prix, plus il y a obligation de les consacrer au service du Seigneur". Ainsi le mouvement imprimé aux arts se fortifie en se propageant; le progrès est continu, rapide: à l'art roman vont succéder, dans la plus grande partie de l'Occident, les magnificences de l'art gothique.





3- Les XIIIème et XIVème siècles


FRANCE

Les événements politiques qui, dès le XIème siècle, ont tant contribué au relèvement des arts, exercent, au XIIème et au XIIIème siècles, une influence sans cesse accrue. Les croisades font mieux connaître les monuments de l'Orient, les civilisations brillantes qui se sont développées là-bas, net éveillent l'imagination des artistes. A l'intérieur les progrès du pouvoir royal assurent plus d'ordre et de prospérité. Aussi, est-ce surtout dans le domaine du roi, dans la France qui se réforme, que l'activité est grande. Suger, qui assure la puissance de Louis VI et de Louis VII, fait reconstruire l'église Saint-Denis avec une magnificence qu'il a lui-même décrite. Plus tard, les rois Philippe-Auguste, Saint-Louis, interviennent dans le développement des arts. Mais, entre toutes les causes favorables qui agissent alors, une des plus importantes est la situation des villes. Partout se développe la vie municipale, grâce aux corporations ouvrières et marchandes qui en ont été le principe et qui en sont la force. Dans les cités actives et puissantes vont se dresser les grandes cathédrales. Elles ne servaient pas seulement aux cérémonies du culte: en bien des villes, là souvent se réunissaient les bourgeois, les gens de la commune, pour discuter leurs intérêts. En même temps, la condition des artistes évolue. A partir de la fin du XIIème siècle, ce sont en général des laïques. Ils se groupent en corporations (peintres, imagiers, enlumineurs, etc..), qui ont leurs règlements et leur administration. Lorsqu'il s'agit de construire quelque grande édifice, toutes ces corporations artistiques y contribuent; mais celui qui dirige l'ensemble des travaux est appelé le maître de l'oeuvre. Les noms de quelques-uns de ces maîtres d'oeuvre nous sont connus.
La Cathédrale d'Amiens

Robert de Luzarches, au début du XIIIème siècle, commencer la cathédrale d'Amiens; Thomas de Cormont et son fils Regnault lui succèdent. 
 On doit à Pierre de Montreuil une des oeuvres les plus exquises de ce temps, la Sainte-Chapelle (1245-1248); à la même époque, Jean de Chelles travaille aux portrait latéraux de Notre-Dame de Paris. 
Citons encore, entre bien d'autres, Hugues Libergier, qui construit Saint-Nicaise à Reims (à partir de 1229), et Erwin de Steinbach, qui commence la cathédrale de Strasbourg en 1277.
Ces artistes sont instruits; on conserve à la Bibliothèque nationale un 
manuscrit qui donne une juste idée de leurs connaissances, "l'Album de Villard de Honnecourt". 
Il semble que ce soit lui qui construit le chevet de la cathédrale de Cambrai, peut-être vers 1230.
L'ancienne cathédrale de Cambrai
Plus tard, il est appelé en Hongrie et quelques vieilles églises de ce pays pourraient être son oeuvre; il visite aussi la Suisse. 
Les artistes du Moyen-Âge voyagent beaucoup, entretiennent entre eux des relations.
La variété des dessins de Villard de Honnecourt montre combien il était actif et versé dans la pratique des divers arts.
L'architecture y tient une large place; mais à côté on y trouve des croquis pour des sculptures, des études d'après nature et même d'après l'antique. Il fait connaître aussi une méthode géométrique qu'il avait imaginée pour dessiner et grouper des figures; enfin il n'est pas jusqu'au problème du mouvement perpétuel auquel il prétend donner une solution.



Miniatures et vitraux

La Sainte-Chapelle- Paris
Les cathédrales gothiques françaises n'offrent pas de grande place à la peinture. A l'inverse, les Italiens, n'employant pas le vitrail, ont orné de peintures les parois de leurs églises. Ce n'est pas que l'art gothique français dédaigne les effets des coloris, les ornements peints couvrent les parois, imitant souvent les dessins des étoffes, et la polychromie s'étend aux moulures et aux chapiteaux; mais les murs, percés de fenêtres et d'arcades, n'offrent guère les surfaces continues que réclament de vastes compositions; aussi le plus souvent est-ce sur les fenêtres même que le peintre trouve à s'exercer. Grand nombre de cathédrales ont conservé en partie leurs immenses verrières; les sujets y sont traités avec le même talent que dans les oeuvres sculptées, les tons y sont combinés avec une harmonie et un sentiment juste de l'effet qui s'altéreront dès le XIVème siècle. Nulle part ce système de décoration n'a été employé avec plus d'éclat qu'à la Sainte-Chapelle de Paris; à l'étage supérieur, les murs sont, pour ainsi dire, supprimés et remplacés par les vitraux aux tons diaprés, si bien que, pour employer le langage d'une vieille légende chrétiennes, les parois semblent construites avec de la lumière.
L'ornementation des manuscrits est toujours en honneur: les miniaturistes et les calligraphes de Paris sont forts célèbres, même à l'étranger.
Suivant la même voie que les sculpteurs, ils délaissent les conventions, s'inspirent de la nature; parmi leurs figures, beaucoup sont évidemment des portraits.
Leur dessin est à la fois précis et souple, leur style élégant et fin.
Sur des fonds d'or épais, l'enluminure des manuscrits reste stylisée et thématique, comme le vitrail. Ce 
n 'est qu'à la fin du XIVème siècle, sous l'influence du naturalisme des imagiers flamands que les miniatures du duc de Berry, du duc d'Anjou et du duc de Bourgogne apportent la vie et l'intimité dans l'ornementation des manuscrits.
On y retrouve toutes les caractéristiques fondamentales qu'offrent ses assises à la peinture française: tendance à la figuration plane, amour de la calligraphie, goût prononcé pour la décoration, préférence pour les tons plats auxquels le trait d'un dessin incomparable insuffle la vie, le mouvement et le dynamisme.
Vers le milieu du XIVème siècle, la peinture a acquis tous ses droits dans la cité" des arts plastiques, et, sous l'impulsion des Valois, Paris devient un centre artistique de tout premier ordre. Au cours de cette période, deux milieux artistiques se partagent la production de tableaux: d'une part, le centre et l'est de la France, englobant l'ouest et le sud des Pays-Bas, d'autre part, la Provence. Paris dicte ses volontés aux foyers du Centre et de l'Est; bientôt rayonnent Bourges, Dijon, Valenciennes. Le centre artistique méridional se trouve en Avignon.
La Dame à la Licorne
L'école provençale subit avant tout l'influence italienne, l'école du Nord se trouve bientôt sous la tutelle des flamands qui, prédestinés au mode de représentation réaliste, introduisent en France une peinture avide de vérité. Peu à peu, le réalisme s'affirme, le destin perd de sa dureté, les couleurs se prêtent mieux au modelé, en même temps que les fonds or laissent la place au paysage.
L'école du Nord débute pour nous avec Jean Pucelle: "Bréviaire de Belleville (Bibliothèque nationale, Paris)"; puis Melchior Broederlam: "Le retable de la Chartreuse de Champmol (Musée de Dijon)"; et Henri Belle chose: "La dernière Communion et le Martyre de Saint Denis (Musée du Louvre, Paris)".
Il faudrait également évoquer l'art cde la tapisserie dont le Moyen Âge a fait un des éléments essentiels de la décoration des édifices civils. Dans bien des cas, la tapisserie, plus résistante que la peinture murale était destinée à la remplacer. Citons la tenture d'Angers de la fin du XIVème siècle, la suite de "La Dame à la Licorne" du musée de Cluny.



Epoques de l'Art gothique

Considéré dans son ensemble, l'art gothique est à son apogée au XIIIème siècle; il unit alors harmonieusement la force et l'élégance, la simplicité et l'habileté technique. Déjà, dès le siècle suivant, ces qualités s'altèrent. Ce n'est pas que les arts ont cessé d'être à l'honneur: princes, seigneurs, bourgeois déploient un faste extraordinaire, encouragent les artistes et recherchent leurs oeuvres; Charles V les appelle à la cour; les peintres Jean Coste et Colard de Laon, l'architecte Raymond du Temple, le sculpteur Jean de Saint-Romain font partie de sa maison et comptent parmi ses favoris; lui-même dirige les travaux du nouveau Louvre, multiplie les résidences royales, réunit les belles pièces d'orfèvrerie et les manuscrits enluminés. Mais les artistes du XIVème et du XVème siècles n'ont plus le goût aussi sûr que ceux du XIIIème, et le désir de faire preuve d'originalité les entraîne à des innovations dangereuses. En architecture (parmi les plus belles églises du XIVème siècle, citons Saint-Ouen de Rouen, Sainte-Cécile d'Albi, etc...), ils veulent étonner le regard par la légèreté et la richesse des constructions.
L'art gothique recourt aux artifices pour se faire admirer. Parallèlement, on construit moins de grandes églises, plus de chapelles; l'architecture seigneuriale fait une plus large part à la recherche du confortable et l'aspect des châteaux devient moins rude; les hôtels, les demeures de plaisance se multiplient; l'art civil tient une place de plus en plus grande.




L'Art Gothique, hors de FRANCE

Né en France, l'art gothique s'est répandu dans toutes les contrées voisines. Les pays du Nord surtout lui ont fait bon accueil et lui sont restés fidèles. En Allemagne, le nouveau style apparaît, au XIIIème siècle, à Notre -Dame de Trèves (1227-1244), à Sainte-Elisabeth de Marbourg (1235-1283); il atteint à tout, son éclat à la cathédrale de Cologne, commencée en 1248, où l'imitation de la cathédrale d'Amiens est si visible dans le chœur. De la région du Rhin il se propage dans toutes les autres parties de l'Allemagne et plus au Nord, en Scandinavie. En Angleterre, c'est un maître français, Guillaume de Sens, qui, en 1174, l'introduisit à la cathédrale de Canterbury.
La cathédrale de Canterbury

Au XIIIème siècle, s'élèvent les églises de Westminster à Londres, les cathédrales de Salisbury, de Lincoln, etc... Déjà cependant se montrent certaines différences avec l'architecture du continent; les églises anglaises n'ont 
régulièrement que trois nefs, et aux absides circulaires se substituent souvent des chœurs carrés. Au XIVème siècle, en Angleterre comme en France, l'art se complique, c'est ce que les Anglais appellent le style décoratif ( cathédrale d'Exeter, d'York).
Enfin, au XVème et au XVIème siècle, le style Tudor pousse la prodigalité de l'ornementation à un degré qui n'atteignait même pas notre style flamboyant; la chapelle d'Henri VII à Westminster (1502-1520) en est le plus curieux exemple.
En Espagne et au Portugal, les monuments où l'on trouve les plus aqnciennes traces du gothique sont les cathédraleds de Burgos (commencée en 1221) et de Tolède (commencée en 1227).
La cathédrale de Tolède (Espagne)

Là, le nouveau  style se mêle parfois à des éléments arabes.
Enfin, en Orient même, en Syrie, à Chypre, à Rhodes, etc.. l'art gothique pénètre avec les croisés.
La Renaissance italienne, telle qu'elle s'est développée d'une façon continue jusqu'au XVIème siècle, commence déjà au milieu du XIIIème siècle.
Dans le nord et le centre surtout, se sont formées de véritables républiques, prospères par leur industrie et leur trafic, et où la vie politique est très ardente. Au XIIème et au XIIIème siècles, Pise, Gênes, et surtout Venise sont à la tête du commerce chrétien en Orient; Milan dominer en Lombardie; Florence, la cité démocratique par excellence, répand partout ses draps et ses soies. Cet accroissement de la richesse chez les populations intelligentes amène le progrès des arts; chaque ville désire les plus beaux édifices; les bourgeois opulents se piquent d'une même émulation: ainsi se forment dans bien des cités des écoles artistiques originales.
Plus tard, les hommes d'Etat qui sont parvenus à établir leur pouvoir aux dépens des anciennes institutions, comme les Médicis à Florence, les Visconti et les Sforza à Milan, etc..., conservent ces traditions: au milieu des révolutions politiques, l'art se développe donc sans interruption.
La littérature et les croyances exercent aussi sur sa naissance une puissante uinfluence. Par  bien des côtés l'art italien procède de Dante et de saint François d'Assise, dont le prestige a été si grand et si populaire en Italie à cette époque.
Dante, le philosophe amoureux

Dante, qui dans "la Divine Comédie", abandonne le latin, la langue du passé, pour l'idiome vulgaire, monte aux artistes comment il faut s'affranchir des traditions; en même temps que ses conceptions mystiques, ses descriptions pleine de vie s'emparent de leurs imaginations et les inspirent. Saint François prêche aux hirondelles, convertit le loup; dans un cantique d'une poésie ardente, il invoque la création entière et appelle les étoiles, les vents, les oiseaux, ses frères et ses soeurs; par là, il consacre l'amour de la nature. Alors un souffle nouveau pénètre l'art: Giotto, le grand novateur en peinture est l'ami de Dante; en même temps une partie de son oeuvre célèbre saint François. Chez presque tous les artistes de ce temps se retrouve le double souvenir du saint et du poète. Qu'on y ajoute l'étude de l'antique, qui se développera de génération en génération, et on aura les principaux éléments de la Renaissance italienne: l'expression de la vier, l'observation de la nature, l'influence du passé.
Au XIIIème siècle et au commencement du XIVème siècle, trois hommes personnifient l'art sous trois formes principales: Nicolas de Pise, Giotto, Arnolfo del Cambio.
Chaire du baptistère de Pise

Nicolas de Pise est né entre 1205 et 1207 en Toscane. Les grandes oeuvres, qui marquent une nouvelle évolution dans la sculpture, datent de sa vieillesse: ainsi la chaire du baptistère de Pise (1260), le sarcophage de saint Dominique à Bologne (1266), la chaire de la cathédrale de Sienne (1266-1268), à laquelle son fils Jean a collaboré. Dans ces bas-reliefs, si les sujets religieux sont ceux qui traitait le Moyen Âge, le style se rapproche cde l'antique. On a pu prouver que les sarcophages romains conservés au Campo Santo de Pise ont frappé l'artiste, qu'il leur a emprunté même certaines figures, alors qu'il travaillait à la chaire du baptistère. Ainsi s'est transformé son style; mais ses personnages sont encore lourds, ses compositions souvent gauches. Son fils Jean (1240-1320) s'asservit moins à l'antique et s'inspire plus de la nature; ses oeuvres, comme la chaire de la cathédrale de Pise (1302-1311), la statue de Pise au Campo Santo, sont pleines de vie. Il faut attribuer à son école les beaux bas-reliefs de la cathédrale d'Orvieto où  se manifestent les mêmes qualités.
Avec Giotto  (1266-1337), la peinture prend définitivement une physionomie toute nouvelle. Son talent consiste surtout à avoir rompu avec l'influence byzantine. Il s'inspire des gothique, notamment de Jean de Pise, et surtout de la nature. Son art est une alliance entre la tradition byzantine, grande et majestueuse, et la manière gothique, gracieuse et humaniste. Il conserve du passé l'inspiration  religieuse,  mais il l'exprime sous des formes nouvelles. Ses figures ont le charme de la vie et de la grâce: elles appartiennent au monde contemporain de l'artiste. Giotto fut l'élève du Florentin Cimabue (1240?-après 1302). On racontait à Florence, au milieu du XVIème siècle, que des peintres byzantins, appelés dans cette ville, avaient éveillé, vers 1260, le talent de Cimabue, considéré comme le premier peintre italien. 
Giotto

On ajoutait que Cimabue, à son tour, découvrit le génie du berger Giotto, en le voyant tracer, avec une pierre pointue, la silhouette d'une brebis. L'influence de Giotto a été majeure. La plupart des peintres illustres du XVIème siècle, dans l'Italie centrale, relèvent de lui: Taddeo Gaddi, Giottino, Spinello Aretino, Orcagna, etc... Les sculpteurs même suivent son exemple: ainsi Andrea Pisano était l'ami et l'élève de Giotto; les bas-reliefs dont il orna une des portes du Baptistère de Florence (1330-1336) le prouvent. Le reproche qu'on pourrait adresser à tous ces disciples serait plutôt de s'être montré trop fidèles au maître: jusque vers le milieu du XVème siècle l'école florentine présente une physionomie très uniforme .A Sienne, longtemps rivale de Florence, s'est développée une école de peinture que représente, au commencement du XVIème siècle, Duccio, encore attaché aux traditions des maîtres byzantins. Il a joint à ses compositions grandioses un sentiment large, sinon délicat de la ligne. Le premier, il a transformé en véritables tableaux, c'est-à-dire en groupements artistiques de figures, les chroniques peintres du Moye Âge, que les âmes pieuses avaient déchiffrées pendant des siècles, comme une sorte de Bible des illettrés. Pétrarque le place au même rang que Giotto. Il meurt à Avignon tandis qu'il travaille à la décoration du palais pontifical. 

A Sienne, Duccio di Buoninsegna est l'ancêtre d'une nombreuse lignée de peintres: Simone Martini dit Memmi, Ambrogio Lorenzetti, admirateur passionné de l'Antiquité et Taddeo Gaddi. 
Sans atteindre à la puissance des Florentins, ils ont montré peut-être plus de passion, de poésie et de suavité.
Cependant, dès le XVème siècle la sève de l'école siennoise est épuisée. 
C'est Florence qui lui envoie des peintres après avoir profité de ses leçons.


 Cenni di Peppi "dit CIMABUE" (+/-1240-+/-1302)

selon Vasari, et en cela il rejoint l'opinion de Boccace, Cimabue est le père de l'école italienne et le plus ancien peintre de ce pays. Mosaïste, peintre à fresque et de retables a tempera, Cimabue représente la transition entre la tradition byzantine et les besoins d'une création, la nécessité d'un renouveau. Si ses madones sont raides, ses têtes d'anges uniformes, si ses draperies manquent de souplesse et si ses compositions sont d'une symétrie et d'un parallélisme absolus (manières issues de l'héritage byzantin), l'intense dramatisation portée dans ses oeuvres traduit une humanisation nouvelle. Ses croix peintes, avec un Christ à demi nu ayant la tête inclinée, témoignent de cette piété occidentale qui tend à dramatiser 3la Passion du Christ".

Rendu célèbre par diverses oeuvres exécutées à Arezzo, Rome et Pise ("Crucifix", devant être l'un de ses premiers ouvrages datant de 1260/65), Cimabue se faît connaître par ses grandes Madones, à l'allure si imposante, de l'Accademia et par celle de l'église Santa Maria Novella de Florence.
L'église Santa Maria Novella -FLORENCE

"Cette figure, dit Vasari, la plus grande que l'on eût tenté jusqu'alors, est entourée d'anges qui témoignent que, si notre artiste n'avait pas complétement délaissé la manière grecque, il s'était du moins approché du bon style moderne. Le tableau excita l'enthousiasme général. Le peuple s'empara de la Madone et la porta en triomphe, au bruit des trompettes et des cris de joie jusqu'à l'église où elle devait être déposée".
Son oeuvre majeure se trouve à Assise, devenu du XIIIème au XIVème siècle le principal chantier pictural de l'Italie où il exécuta, entre 1277 et 1290, la décoration de la basilique.

 Duccio di Buoninsegna(+/-1255-+/-1319)

Elève de Cimabue, de peu l'aîné de Giotto, contemporain de Cavallini, Duccio di Buoninsegna appartient à une génération de transition: pénétré de l'esprit byzantin, il est attiré par le gothique. En ce sens, il annonce Giotto à qui il ouvre la voie. En 1285, il peint à Florence la "Madone Rucellai" pour Santa Maria Novella (Galerie des Offices, Florence). 
La Madone Rucellai

Comme dans les images byzantines, la Vierge apparaît lointaine, les figures des anges qui l'entourent ne s'intègrent pas dans l'ensemble, pas plus que le trône qui a cependant un rôle constructif. Pourtant, cette oeuvre accuse un sens si aigu de la forme harmonieuse et expressive qu'il semble bien qu'en elle s'annonce le style gothique dont la qualité essentielle est de posséder ce sens et de l'avoir développé.
C'est ainsi que ce tableau immense (4,5 x 2, 30m) a exercé une très grande influence sur le style florentin.
Cette conception et ce style se confirment dans son oeuvre  principale, "la Maestà", peinte entre 1308 et 1311 pour le maître autel de la cathédrale de Sienne (Museo del Opera dell' Duomo, Sienne).
L'oeuvre est peinte sur les deux faces d'un anneau: le recto représente "la Madone en gloire", tandis que le verso retrace en vingt-six miniatures la vie du Christ.
Cette oeuvre portée en triomphe par le peuple de Sienne, raconte Vasari, porte les bases de ce que sera l'école siennoise: la subtilité des couleurs se fondant les unes aux autres, la précision du trait et la rigueur du dessin des personnages.
Citons parmi les oeuvres importantes de Duccio "la Madone des Franciscains" 1290-1295 (Pinacothèque nationale, Sienne), le triptyque de "la Madone entourée des saints (National Gallery,
La Cathédrale de Sienne, Italie
Londres
) et "la Vierge à l'Enfant" (Galleria Nazionale
dell 'Umbria, Pérouse).
Le vitrail de l'abside de la cathédrale de Sienne lui est aussi attribué. 
Duccio s'est donc montré l'ancêtre, à Sienne, d'une nombreuse lignée de peintres, tels que Memmi, Lorenzetti ou Taddeo Gaddi.
Pour effacer les dernières traces du style byzantin que voulait tant vaincre Duccio, il a fallut le talent de Giotto à qui il a grandement ouvert la voie.

Giotto di Bondone(+/-1266-+/-1337)

Fils d'un paysan, Giotto est tout d'abord l'élève de Cimabue avec lequel il a peut-être collaboré à Assise. La partie peinte par Giotto représentant "La légende de saint François", qui aurait été commandée par le Père Supérieur Giovanni di Muro vers 1297, suscite bien des controverses quant à son attribution. De 1298 à 1300, Giotto part à Rome à la demande de Boniface VIII et y commence une existence de voyage de cour en cour qu'il ne cessera de mener: à Rimini vers 1311, à Venise vers 1314, à Avignon en 1316, puis à Ferrare, à Ravenne et, plus tard en 1330, en 1335, à Naples et à Milan
A Rome, il assemble une mosaïque représentant "le Christ sauvant saint Pierre des Flots", dite "La Navicella", aujourd'hui au Vatican. Vers 1302, Giotto exécute les fresques de la chapelle du palais du podestat de Florence, aujourd'hui musée national, parmi lesquelles figurent "une glorification de la Vierge" et "le portrait de Dante". De 1303 à 1306, il décore la "Madonna dell' Arena", une chapelle dédiée à la Vierge de l'Annonciation qu'un riche patricien, Enrico Scrovegni, fit construire à Padoue
Cette série de fresques comprend des sujets inspirés de l'Ancien et du Nouveau Testament, "une Vie du Christ", basée sur les apocryphes et des emblèmes monochromes des "Vertus et des Vices".
Pour cette oeuvre immense, il est probable que Giotto se soit fait seconder.
A Florence, se trouvent deux autres cycles de fresques: "La légende de saint François" (1317-1328)", (Chapelle Bardi, Santa Croce) et des scènes de "la Vie de saint Jean l'Evangéliste" et de "la Vie de saint Jean-Baptiste (Chapelle Peruzzi, Santa Croce).
La cathédrale de Florence, Italie

Nommé architecte de Florence en 1334, Giotto a pris la succession d'Arnolfo di Cambio à sa mort dans la construction de la cathédrale de Florence et a probablement collaboré avec Andrea Pisano dans l'établissement des plans du campanile de la cathédrale de Florence qui porte son ,nom et dont certains bas-reliefs lui sont également attribués.
Le talent de Giotto est d'avoir détaché la peinture de ses attaches byzantines et de son cadre médiéval en donnant au corps humain la forme que ses observations et son sens de la plastique lui ont permis de noter et de reproduire.
 Dans le choix de ses objets, il s'est laissé guider par les préoccupations religieuses de son époque tout en renouvelant les thèmes. 
Par la disposition de leurs détails, la vie puissante  des personnages qu'avive encore la composition variée des plans qui remplissent la perspective linéaire, il est le grand maître qui a su humaniser la peinture en substituant à un formalisme mort un souffle de vie irrésistible.
Il est le vrai fondateur de la peinture italienne et a exercé une influence majeure tant sur ses contemporains que sur les générations suivantes.

Lorenzetti Ambrogio(+/-1290-+/-1348)

Ambrogio Lorenzetti est l'élève de Giotto; l'influence dans sa peinture qui accuse cependant un réalisme plus accentué.
Ses tableaux allégoriques, tels que "l'Allégorie du bon et du mauvais gouvernement et de leurs effets", 1337-1339 (Palais Public , Sienne), trahissent le penseur pourri d'Aristote. 
Allégorie du Bon Gouvernement

Dans la dernière période de sa vie, il peint des oeuvres empreintes d'un grand lyrisme: "la Madona Cagnola" (Pinacothèque de Brera, Milan) ou "la Présentation au Temple" (Musée des Offices, Florence).



Lorenzetti Pietro(+/-1280-+/-1348)

Frère aîné d'Ambrogio avec lequel il collabore, Pietro est tout d'abord l'élève de Duccio. 
Tryptique de la Naissance de la Vierge
Sa première oeuvre est commandée par l'élève Guido Tarlati pour le maître-autel de Santa Maria della Pieve à Arezzo.
Elle comprend "une Vierge à l'Enfant avec quatre saints, une Annonciation, une Assomption et douze saints".
On lui attribue en outre les très célèbres fresques du Campo Santo à Pise et plusieurs toiles, telles que "la Naissance de la Vierge", 1335-1342 (Museo del Opera dell' Duomo, Sienne), ou "le Polyptique de la Sainte Humilité", 1341 (Musée des Offices, Florence).
Coloriste remarquable, il continue la composition propre à l'école de Sienne et au réalisme de Giotto et des Pisans.
Il n'est pas exclu que la peste qui sévit à l'époque à Sienne ait emporté les deux frères.




Andrea di Cione, dit Orcagna(+/-1308-+/-1368)

Orcagna est à la fois peintre, mosaïste, sculpteur et architecte.
En tant qu'architecte, il travaille aux cathédrales d'Orvieto et de Florence. Son chef-d'oeuvre en sculpture est "le Tabernacle d'Orsanmichele à Florence; il est couvert de reliefs inspirés de la vie de la Vierge et de sculptures allégoriques.
Son oeuvre peinte comporte un grand polyptique, conservé dans la chapelle Strozzi (Santa Maria Novella, Florence), exécuté entre 1354 et 1357. 
Suivant la manière de Giotto, la composition est solide, les figures monumentales sont d'une beauté surprenante, le coloris riche et brillant.
Il ne reste de son second chef-d'oeuvre que quelques fragments des trois fresques réalisées pour Santa Croce  à Florence.




4- Le XVème siècle

L' ITALIE

Le Quattrocento, c'est-à-dire le XVème siècle italien, aura été l'une des périodes les plus fécondes de l'histoire de l'art occidental. 
Partout que ce soit en France, en Allemagne, et surtout dans les Flandres, on assiste à un foisonnement de génies de la peinture.
Mais nulle part autant qu'en Italie, s'impose cette explosion artistique.
Trois découvertes participent au renouveau des beaux-arts: la perspective linéaire, la peinture à l'huile et la gravure.

La perspective linéaire:
l'architecte Brunelleschi passe pour être le premier qui ait appliqué au dessin les lois de la perspective.
Filippo Brunelleschi

En fait, c'est Uccello qui en fait le premier usage dans ses toiles et qui trouve dans cette science, des règles que les peintres peuvent facilement appliquer.











La peinture à l'huile: 
Antonello da Messina entendit un jour parler d'un tableau de Jean de Bruges (Jan van Eyck) que possédait le roi Alphonse, et, qui, disait on, résistait à l'eau et au toucher sans que la qualité de l'oeuvre en soit altérée.
Antonella da Messina

Toutes affaires cessantes, il partit pour la Flandre et gagna si bien l'amitié de Van Eyck que ce dernier lui confia les moindres secrets de sa découverte.
A la mort de Van Eyck, Antonello da Messina revint en Italie pour y peindre un grand nombre de tableaux à l'huile et ne tarda pas à acquérir une immense renommée.


La gravure:
En 1452, à l'époque de Gutenberg et Faust impriment à Mayence leur première Bible latine, dite "à quarante-deux lignes", le Florentin Masso Finiguerra crée les premières estampes en prenant des empreintes sur une patène d'argent. Ainsi, conjointement en Europe, la gravure, qui est l'imprimerie des beaux-arts, est découverte en même temps que l'imprimerie, gravure des belles lettres.
Il faudrait pouvoir parcourir l'Italie ville par ville: partout travaillent les artistes, partout se multiplient les oeuvres d'art.
Princes et cités s'arrachent les artistes, car ce n'est pas seulement l'élite, mais le peuple tout entier qui, comme autrefois en Grèce, s'intéresse à leur production.
Sans cesse stimulé, discuté, jugé, l'artiste s'exalte dans la lutte, multiplie ses efforts, et doit surenchérir et remettre en cause ses propres oeuvres pour mériter la gloire.

FLORENCE

En peinture, les artistes florentins rompent avec les traditions de l'école de Giotto.
Paolo Uccello (1397-1475) répand le goût de la perspective dont les anciens peintres ne se préoccupaient guère; Fra Filippo Lippi (1406-1469), fort en faveur auprès des Médicis, traite les sujets religieux avec une liberté d'allure et une recherche du réalisme marquées.
Le maître par excellence de cette première moitié du XVème siècle est Masaccio (1401-1428), véritable précurseur de Raphaël, qui allie à la science de la composition, tantôt la force, tantôt la suavité de l'expression.
L'église Santa Maria del Carmine- Florence
Si courte qu'ait été son existence, il a produit des oeuvres où se sent déjà la pleine maturité du talent, comme ses fresques de Santa Maria del Carmine à Florence
Par la suite, elles seront pour les jeunes artistes des modèles qu'ils étudieront et qu'ils copieront.
Mieux que par Fra Filippo Lippi, la leçon de Masaccio est entendue par Andrea del Castagno (1423-1457) et Andrea Verrocchio (1435-1488) dont l'atelier se révèle être une véritable école d'humanisme où l'on pratique tous les arts, y compris la musique.
Verrocchio accueille en effet toutes les nouveautés, et en particulier la technique à l'huile qui impressionne l'un de ses élèves, Léonard de Vinci.
Il convient de réserver à Piero della Francesca (vers 1410-1490), le plus grand fresquiste florentin entre Giotto et Michel-Ange, une place toute particulière: savant en géométrie et en perspective comme en témoignent ses écrits techniques, il étudie la nature avec précision d'anatomiste. Dans les grandes fresques de l'église San Francesco à Arezzo, racontant "La Légende de la Sainte Croix", il résume toutes les démarches antérieures en confirmant que l'art de la peinture est une science.
Le premier en Italie, il découvre l'effet de clair-obscur dans "La Vision de Constantin" où la pénombre de la nuit est déchirée par l'éclair d'une apparition.
Un élève de Piero della Francesca, Luca Signorelli (vers 1445-1523) dépasse la manière douce du maître par des éclairages violents exprimés dans des coloris très vifs.
 la cathédrale d'Orvieto

Dans ses fresques de la cathédrale d'Orvieto, il s'attache à l'expression de la force, et, par ses études de nu et ses préoccupations anatomiques, il fait songer parfois à Michel-Ange.
Benozzo Gozzoli (1420-1497) qui travaille pour les Médicis en réalisant la chapelle de leur palais, décore les murs du Campo Santo à Pise de peintures d'un charme pittoresque, telles que "l'Ivresse de Noé" et "l'histoire de la Tour de Babel".
Il existe encore une école attachée à l'idéal religieux et mystique de l'âge antérieur. Pendant la première moitié du XVème siècle, elle produit un grand maître, le dominicain Fra Angelico da Fiesole (1387-1455). Entré tout jeune au couvent, il conserve la foi naïve profonde dont il fait passer l'expression dans ses fresques et ses tableaux. Nulle part, il ne s'est élevé plus haut que dans les peintures murales dont il décore le couvent de San Marco à Florence et une des chapelles du Vatican à Rome.
Exécutées vers la fin de sa vie, ces dernières l'emportent sur ses autres oeuvres par la variété des compositions: les sujets en sont empruntés à l'histoire de saint Etienne et de saint Laurent. Fra Angelico est une exception à Florence.
Vers le milieu du XVème siècle, la nouvelle école naturaliste triomphe dans tolus les arts. Alors, dans un espace de dix à vingt ans, disparaissent la plupart des maîtres dont on vient de parler, et, avant d'arriver à Léonard de Vinci, à Michel-Ange, à Raphaël, commence pour l'école florentine une période de transition qui remplit la plus grande partie de la second moitié du XVème siècle.
L'admiration passionnée de l'antique s'y combine avec le naturalisme,. L'Eglise elle-même donne l'exemple: plusieurs cardinaux, des papes, comme Nicolas V, qui figurent parmi les humanistes célèbres. Laurent de Médicis, qui gouverne Florence de 1469 à 1492, élégant, instruit, poète même, célèbre le culte de Platon avec les lettrés de sa cour. Il augmente la collection d'antiques formée par ses prédécesseurs, il la met à la disposition des artistes et crée par là comme une école des beaux-arts.
Les architectes Giuliano et Antonio de Sangallo s'absorbent dans l'étude des monuments romains, Pollaiuolo (1431-1498) exécute pour les Médicis des tableaux représentant des sujets tels que les exploits d'Hercule; Botticelli (1445-1510) fait de continuels emprunts à la mythologie païenne, bien qu'il réussisse mieux à peindre des madones chrétiennes. Parmi les peintres de cette époque, Domenico Ghirlandaio (1449-1494) est l'un des plus originaux.
Chœur de
Santa Maria Novella-
Florence

Dans les scènes de l'histoire de la Vierge et de saint Jean-Baptiste dont il a orné le
chœur de Santa Maria Novella à Florence, costumes, attitudes, types de personnages, détails de mœurs, tout appartient à la vie du XVème siècle, et il semble que les données évangéliques ne soient plus ici qu'un prétexte: les compositions sont bien ordonnées, le dessin ferme et précis.
L'esprit profane de la Renaissance florentine trouve vers la fin du XVème siècle un ardent adversaire dans le moine Jérôme Savonarole, qui, grâce à son éloquence fougueuse et sombre, devient quelques temps le maître de Florence. Il condamne l'étude de l'Antiquité et désire dégager l'art du culte de la forme pour le purifier et le sanctifier. Ses idées gagnent les artistes eux-mêmes: beaucoup deviennent ses partisans. Mais bientôt la vie nouvelle que Savonarole 
veut imposer aux Florentins leur paraît trop dure, son influence faiblit et ses ennemis le mettent à mort.



La Peinture hors de Toscane

L'école Ombrienne

L'art religieux que réclama Savonarole, on la pratique encore non loin de Florence, dans la montagneuse Ombrie. Le grand maître ombrie est Pietro Vannuci, dit le Pérugin (1445-1523), parce qu'il habite surtout Pérouse. Il a travaillé souvent à Florence et connaît les innovations qui transforment alors la peinture. Elève de Verrocchio, il demeure toujours le peintre du doux recueillement, des divines extases; le peintre par excellence des madones et des saintes. Son oeuvre la plus considérable est la décoration de la salle du Collegio del Cambio à Pérouse (1497-1500); quant à ses tableaux, le nombre en est grand; on peut en voir au Louvre; le musée de Lyon possède un des plus beaux, l'Ascension (1496).
Collegio del Cambio à Pérouse 

Pinturicchio (1454-1513), dont les oeuvres les plus importantes sont les décorations de la Librena Piccolomini de la cathédrale de Sienne et des appartements Borgia au Vatican, se distingue par sa recherche des sujets historiques et des effets pittoresques.


L'école de Padoue

Dans le nord de l'Italie, se sont établis d'autres centres de cultures artistiques. Ainsi à Padoue, naît et se forme un des grands maîtres de la peinture, Mantegna (1431-1506). Son génie vigoureux interprète l'Antiquité avec une franchise d'accent toute personnelle; dessinateur précis, parfois un peu sec, connaissant à fond la structure des corps, il donne à ses personnages une fermeté et une fierté d'allure surprenantes: les cartons du "Triomphe de Jules César" (à Hampton Court, près vde Londres) ont le style de bas -reliefs. Pourtant son originalité éclate mieux encore dans  les fresques de l'église des Eremitani, à Padoue. La force de la conception y égale la science des procédés, l'ordonnance grandiose de la composition, en même temps que les édifices dont il encadre ses figures, attestent l'étude des monuments anciens.


L'école de Ferrare

Ferrare est également un centre d'art, animé par la famille d'Este. C'est là que travaillent Francesco del Cossa (1435-1478), Cosmè Tura (1430-1495 et Ercole de Roberti (1450-1496). L'influence de Mantegna s'unit à celle de Piero della Francesca qui a commencé à décorer le palais des ducs d'Este. Les souvenirs des deux maîtres sont également sensibles dans les fresques de la villa Schifanoia où Francesco del Cossa a représenté avec une grande exactitude la vie de Borso d'Este et de sa cour, au-dessous d'allégories des mois du zodiaque. Il exagère la sécheresse du maître et dessine durement les membres anguleux et les visages grimaçants.


L'école de Sienne

Au Quattrocento, à côté de Florence, la peinture siennoise n'a plus l'autorité qu'elle avait le siècle précèdent. Elle se range dans le traditionalisme et prend l'habitude d'une certaine commande d'Eglise. Son meilleur représentant est Stefano di Sassetta (1392-1450). Sous son influence travaille Sano di Pietro (1406-1481), mais c'est surtout un élève de Lorenzo di Pietro, dit-il Vecchietta (1405-1480). Francesco di Giorgio Martini (1439-1502), artiste universel, s'exerçant aussi bien dans la peinture, l'architecture et la sculpture, qui expérimente de nouvelles formes de compositions ("La Nativité" de 1490 à San Domenico, Sienne).


L'école Vénitienne

Au début du Quattrocento, Venise vit, comme toute l'Italie du nord, à l'heure gothique. Plus qu'aucune autre ville d'Italie, tournée vers l'Orient d'où elle tire sa force et sa richesse, elle reste attachée aux traditions byzantines. Cependant au XIVème siècle, l'art gothique y pénètre, mais pour y prendre une physionomie nouvelle et produire ces palais qui paraissent appartenir à la fois à l'Occident et à l'Orient; le Palais des Doges est commencé au XIVème siècle, la Ca 'Doro, dont la façade est une merveille de grâce et de fantaisie, date de la même époque. Les Italiens qualifient ce gothique de fiorito, "fleurie". Dans cette ville, qui volontiers s'isole du reste de l'Italie, l'esprit de la Renaissance ne pénètre que tardivement. Ce n'est qu'à partir du milieu du XVème siècle qu'il y devient sensible en architecture et en sculpture; mais de tous les arts, la peinture est celui qui doit y jeter le plus d'éclat.
Le Palais des Doges- Venise

C'est encore Mantegna qui achève d'émanciper l'école vénitienne des traditions byzantines et giottesques déjà modifiées dans le premier quart du XVème siècle, par l'exemple des fresques peintes par Pisanello (1395-1455) et Gentile da Fabriano (1370-1427) dans le Palais des Doges. Ayant épousé la fille du Vénitien Jacopo Bellini, Mantegna contribue encore au rapprochement de Florence et de Venise.
Vers le milieu du XVème siècle, une école nouvelle y naît avec les Vivarini, et qui par certains côtés, se rattache d'abord aux écoles allemandes. Un peintre sicilien qui est allé en Flandre s'instruire des procédés de Van Eyck, Antonello da Messina, s'établit à Venise et y introduit un style mêlé d'éléments étrangers et d'éléments italiens. Carlo Crivelli (1430-1495), qui peint des madones et des saints, encore fidèle au Moyen Âge par la façon dont il compose ses tableaux et ses figures, éblouit par la richesse des accessoires et l'éclat du coloris. C'est surtout avec la famille des Bellini que se marque l'évolution de la peinture vénitienne. Jacopo Bellini (vers 1400-1471) est sorti de sa patrie pour faire connaissance avec les écoles de Florence et de Padoue, avec le naturalisme et l'antique. De ses deux fils, Giovanni (1430-1516) et Gentile (1429-1507), le premier, âme douce et simple, s'attache aux sujets pieux; il donne à ses vierges et à ses saints une suavité profonde et une grande noblesse. Tout autre est son frère, moins porté aux sentiments mystiques, curieux des effets pittoresques, il aime à rendre l'aspect des  foules, les processions et les cortèges se déroulant sur les places de Venise. Parmi ses contemporains, Carpaccio (1455-1526) a la même tournure d'esprit. Son talent de  chroniqueur lui permet de transposer chaque miracle de la "Légende Dorée" en un épisode de la vie vénitienne. Sa "Vie de sainte Ursule", contemporaine de celle de Memling, se déploie sur de larges tableaux desquels la sainte est presque toujours absente. Il est le véritable peintre du mythe de Venise.

Les Grands Maîtres Italiens

Guido di Pietro, dit "Angelico
Guido di Pietro, en religion Fra Giovanni ou encore « Le Peintre des anges », né entre 1387 et 1395 selon les sources, à Vicchio et mort le 18 février 1455 à Rome, est un peintre italien du Quattrocento de qui Giorgio Vasari disait qu'il avait un « talent rare et parfait ».

Dès son entrée dans les ordres, il peint des miniatures et s'adonne à la décoration de son couvent dont il couvre les murs de peintures à fresque et à la détrempe, techniques apprises d'après son étude des oeuvres de Giotto.
L'influence de ce dernier de la peinture miniaturiste du Trecento et encore celle de Masolino, se fait vivement sentir dans sa première oeuvre, un tryptique réalisé à San Domenico, en 1425-1430.
Il peint sans se lasser, s'inspirant uniquement des sujets religieux, sans jamais retoucher ni changer quoi que ce soit à ses oeuvres. En 1430, Fra Angelico peint "l'Annonciation" pour l'église San Domenico de Cortone, véritable joyau de la peinture italienne du XVème siècle.
Il crée là une sorte de modèle qu'il répétera plusieurs fois. La composition simple, le refus d'une décoration sophistiquée ainsi que la finesse de lignes des personnages annoncent déjà sa manière.
En 1436, Fra Angelico est transféré avec ses confrères au couvent San Marco de Florence (devenu musée national), où il décore de fresques les cellules et le réfectoire. A cette époque, il peint sa "Lamentation sur le corps du Christ" dont la solennité pathétique transmet une atmosphère chargée d'émotion. Le paysage remplace définitivement le fond or moyenâgeux. Il crée la "Sacra Conversazione", une nouvelle sorte de tableaux religieux regroupant des personnages de l'hagiographie  semblant
 conserver, qui supplantera la forme polyptyque traditionnelle, et se répandra pendant la Renaissance.
Pendant l'été 1447, il travaille avec Gozzoli dans la chapelle San Brizio à Orvieto, qui sera achevée plus tard par Signorelli. Il y peint "Le Jugement dernier". L'architecture d'arrière-plan et les personnages atteignent une nouvelle monumentalité.
Fra Angelico se rend deux fois à Rome: en 1445, appelé par le pape Eugène iv, et en 1447, appelé par le pape Nicolas V pour peindre à fresques la chapelle Niccolina au Palais du Vatican. Les détails minutieux des sujets empruntés à la vie de saint Etienne et de saint Laurent sont exprimés dans une tonalité grave sans toutefois effacer la grâce aimable propre à Fra Angelico. L'influence de la Renaissance y est déjà très nette.
Fra Angelico s'est révélé bun dessinateur capable de traiter avec maîtrise n'importe quel sujet. Aucun peintre n'a pu insuffler à ses figures autant de vie, n'a été à même de leur conférer plus de relief. L'art de son coloris est resté sans pareil.


Bellini Gentile (1429-1507, né et mort à Venise)
Bellini Giovanni (1430-1516, né et mort à Venise)

Célèbres par leurs propres oeuvres, ils sont aussi fameux pour avoir été les maîtres de Giorgione et de Titien. Ils débutent tout d'abord dans l'atelier de leur père, Jacopo. En 1469, Gentille est nommé chevalier. En 1483, Giovanni est nommé peintre d'Etat de la cour de Venise et, un an plus tard, il est reçu membre à la Scuola Grande. Leurs premiers ouvrages sont favorablement accueillis.
Giovanni Bellini- La peinture à Venise

En 1474, la République de Venise, voulant perpétuer sur les vieilles murailles de la grande salle du Conseil du Palais des Doges quelques-unes des actions les plus glorieuses pour la patrie, commande aux Bellini l'histoire d'Alexandre III, de ce pape que Venise, sortie victorieuse de sa lutte contre l'empereur Frédéric Barberousse, a replacé sur le trône de saint Pierre. Les deux frères peignent une suite de tableaux perdus plus tard dans un incendie, mais dont quelques-uns, heureusement, ont été conservés par la gravure. Ces immenses compositions, pleine de mouvement, de perspective et de profondeur, sortent le l'immobilité des siècles précédents.
C'est à l'époque ou Byzance vient de succomber. Gentile exécute, à sa demande, le portrait de "Mahomet II" (National Gallery, Londres). satisfait, Mahomet II l'invite à Constantinople pour lui commander d'autres travaux. Il y reste un an, de 1479 à 1480. Là, il est dit que Gentile est témoin s'une scène atroce: après avoir peint "la Décollation de saint Jean", il va montrer son oeuvre au sultan, qui, tout en l'admirant, lui fait remarquer qu'il a mal rendu le retrait qu'éprouvent les chairs du cou après une exécution. Pour prouver la justesse de sa critique, il ordonne d'amener un esclave qu'il fait décapiter sous les yeux /de l'artiste. Gentile, saisi d'horreur, demande aussitôt à retourner dans sa patrie.
De retour à Venise, Gentile exécute pour la Scuola di San Giovanni, tout un cycle: "la Procession sur la Piazza San Marco, 1496, le Miracle de la Croix au Pont San Lorenzo, 1500 et la Guérison miraculeuse de Pietro de Ludovici, 1501" (Accademia, Venise), dans lequel il traduit, d'une manière traditionnelle, dans un grand souci de précision, la vie à Venise.
Avant de mourir, il demande à son frère Giovanni, de terminer "la Prédication de saint Marc à Alexandrie et le Martyre du saint" peuplés de détails empruntés à son voyage en Orient. (Pinacothèque de Brera, Milan). Tandis que Gentile exerce son talent sur les rives du Bosphore, Giovanni, de son côté, travaille avec ardeur et fait des progrès considérables. Un des premiers, en Italie, il quitte la détrempe pour la peinture* à l'huile dont il tire un excellent parti, et exécute surtout un grand nombre de portraits, Giovanni est beaucoup supérieur à son frère; toute l'illustration de leur nom doit lui revenir. Les représentations religieuses et les retables dominent dans son oeuvre. Vers 1506, son style, quoique encore empreint de la  sécheresse de l'école byzantine, d'une imitation trop servile de la nature, innove néanmoins par la vivacité et la souplesse. Citons dans cet esprit ses "Madones" qui rappellent les icônes byzantines et qui seront imitées dans l'Italie tout entière.
L a Renaissance à Florence et à Padoue étends son influence sur Venise. Vers 1465-70, Bellini est touché par la manière de Mantegna et par celle d'Antonello da Messina, évidente dans "le Couronnement de la Vierge", vers 1475 (Museo Civico, Pesaro), oeuvre charnière dans laquelle les personnages ont une simplicité monumentale au sein d'un paysage d'une grande luminosité. 
Puis, comme ses quatre "Allégories profanes" (Accademia, Venise) et son "Allégorie Sacrée" (Musée des Offices, Florence) le prouvent, il s'affranchit de plus en plus de ces influences et acquiert un style libre et dégagé. Aussi, les toiles de sa sa dernière période, autant les portraits que les paysages,  accusent un dessin souple et fluide, et sont par la même d'autant plus émouvantes.. Appelé à Ferrare, en 1514, par le duc Alphonse 1er, il commence, à l'âge de quatre-vingt-huit ans, cette fameuse "Bacchanale" (National Gallery, Washington), que sa faiblesse le force à abandonner, après en avoir tracé la composition générale et en avoir peint les figures. La toile sera achevée par Titien.
Par leurs recherches, les frères Bellini ont présidé vau développement de l'art vénitien du Quattrocento. Ils ont rendu possible l'art de Giorgone et de Titien. Dans son portrait du "Doge Loredan", 1501-1505 (National Gallery, Londres), Giovanni pressent déjà la manière de ses deux élèves. Albrecht Dürer l'a proclamé le plus grand peintre de son époque.

Bellini Jacopo(1400-1471, né et mort à Venise)

Fils d'un chaudronnier, Jacopo Bellini est l'élève de Gentile de Fabriano et d'Uccello. L'oeuvre de ses deux fils Gentile et Giovanni, a occulté la sienne. Il faut cependant lui reconnaître qu'il a été le premier peintre a connaître parfaitement la peinture florentine et à s'intéresser à l'Antiquité. Il travaille à Venise, à Vérone, à la cour de Ferrare et à Padoue. Il peint dix-huit tableaux de la Vierge pour la Scuola Grande di San Marco, à Ferrare, en 1449, où il exécute le portrait de Lionello d'Este, après avoir été mis en concurrence avec Pisanello. A Padoue il réalise un retable pour la chapelle Gattamelata de la basilique del Santo, en collaboration avec ses fils. Ce sont surtout ses paysages imaginaires qui ont amené la Renaissance vénitienne.


Andrea Mantegna, dit Francia (1431-1506, né  à Isola di Carturo, et mort à Mantoue)

Andrea Mantegna, né vers 1431 à Isola di Carturo et mort le 13 septembre 1506 à Mantoue, est un graveur et peintre italien de la Première Renaissance qui a rompu définitivement avec le style gothique en plein milieu du XVᵉ siècle, sans se départir de cette attitude tout au long de sa vie.
C'est le plus grand représentant de la Haute Renaissance en Italie du Nord. Il est à l'origine de l'école milanaise. Son art achève d'émanciper l'école vénitienne des traditions byzantines et giottesques. Il entre très jeune dans l'atelier de Squarcione dont il est le meilleur élève et qui l'adopte comme son fils. Vers 1441, il est membre de la guilde des peintres de Padoue. Elevé dans une ville riche en histoire et dominée par le prestige d'une université pour laquelle l'étude de ce passé relève d'un devoir, Mantegna devient un passionné de l'Antiquité  classique. L'oeuvre de Donatello et d'Uccello qu'il est en mesure d'admirer à Padoue, celle de Castagno à Venise, ne peuvent que confirmer ce penchant. Mantegna assimile rapidement des lois de la perspective qu'on vient de découvrir et il prend un plaisir extrême à s'attaquer, pour les résoudre, aux problèmes les plus délicats que peut poser l'art des raccourcis.
Il est probable qu'il devient indépendant à l'âge de dix-sept ans, car il reçoit en 1448, sa première commande importante: il est chargé, avec une équipe de Vénitiens, Antonio Vivarini, Giovanni d'Alamagna et Nicolo Pizzolo, de décorer la chapelle Ovetari de l'église des Eremitani à Padoue. Ce travail, terminé en 1456, lui assure la renommée. En 1453, il peint un tableau d'autel composé de douze panneaux pour la chapelle Saint-Luc à Santa Giustina (Pinacothèque de Brera , Milan). Un an plus tard, il réalise un "cartellino" daté et signé, "Sainte Euphémie" (Musée de Capodimonte, Naples).
Son mariage avec Nicolasia, fille de Jacopo Bellini et soeur de Gentile et de Giovanni Bellini, le fait entrer définitivement dans l'orbite de ces peintres fondateurs de la grande tradition vénitienne. 
Il devient un grand styliste autant qu'un réaliste dont la sincérité frise parfois la brutalité. Ces tendances apparaissent dès ses premières grandes oeuvres. De 1456 à 1459, à Vérone, il peint un tableau d'autel pour San Zeno, aujourd'hui dispersé: "La Crucifixion "(Musée du Louvre, Paris), "l'Agonie au jardin des Oliviers" et "la Résurrection" (Musée des Beaux-Arts de Tours). Il exécute là son oeuvre capitale. La Vierge et les saints sont rassemblés dans un effet de perspective créant un espace idéalisé.
"la Chambre des Epoux"

En 1460, il entre au service des Gonzague à Mantoue. En de hors de brefs séjours à Florence (1466-1468) et à Rome où il décore pour le compte d'Innocent VIII la petite chapelle du Belvédère (1488-1489), il s'établit à Mantoue pour le res tant de ses jours. L'oeuvre majeure réalisée est la décoration de "la Chambre des Epoux (Camera degli Sposi) située dans l'aile nord du Palais ducal; elle a été commencée en 1465 et achevée en 1474. Mantegna invente un type de perspective qui ouvre la voie à Bramante ou au Corrège et qui aboutira à Tiepolo. Par ce nouveau traitement, il trouve l'art d'unir au sein de sa composition un espace réel à un espace totalement sacré, démarche qui est l'une des principales caractéristiques de l'art baroque.
Pendant cette période, Mantegna réalise également des tableaux religieux importants: "Le Christ mort" , (Pinacothèque de Brera, Milan) dans lequel la technique du raccourci, caractéristique de sa manière, est éclatante; "la Madone aux carriers, 1488 (Musée des Offices, Florence) ou encore "la Vierge de la Victoire", 1495 (Musée du Louvre, Paris) dont le geste rappelle "la Vierge aux Rochers" de Léonard de Vinci.
Le grand art de Mantegna se déploie dans "le Triomphe de César" (Hampton Court, Londres) dont les neuf cartons achevés en 1486 sont une véritable reconstitution archéologique. Il se montre le seul artiste du Quattrocento à puiser son inspiration dans les pièces antiques trouvées en Italie ou rapportées de Grèce. C'est par contre dans les idées humanistes propres à son siècle, qu'il décore le "Studiolo", cabinet d'études d'Isabelle d'Este. Elle fixe elle-même le sujet des tableaux allégoriques. Réalisées entre 1497 et 1505, les scènes ont inspiré bon nombre de peintres du Cinquecento. Certaines, composées de concert avec Le Pérugin et Lorenzo Costa, se trouvent aujourd'hui au musée du Louvre. Enfin, Mantegna a joué un rôle de première importance dans la naissance et la diffusion de la gravure. C'est par son intermédiaire que Dürer et Rembrandt ont découvert l'Italie et la Renaissance.


Tommaso di Giovanni, dit Masaccio(1401-1428, né à San Giovanni Valdarno et mort à Rome

Tommaso di Giovanni Cassai (ou Tommaso di Ser Giovanni di Mone Cassai), dit Masaccio, né le  à San Giovanni Altura (actuellement San Giovanni Valdarno, près d'Arezzo) et mort vers 1428 à Rome, est un peintre florentin fondamental considéré comme l'un des pionniers et des plus grands peintres de la Renaissance.
Fils d'un juriste, Tommaso, dit Masaccio(diminutif du sobriquet Tomasaccio, signifiant le "gros Thomas"), naît à San Giovanni Valdarno, près de Florence. Vasari signale qu'il a été formé par Masolino da Panicale, qui n'aurait été, en fait, que son patron commercial.
"la Vierge à l'Enfant"
Masaccio est l'un des grands pionniers de la Renaissance, le créateur de la peinture florentine. Il est à la peinture ce que Donatello est à la sculpture et Brunelleschi à l'architecture. L'étude de leurs travaux lui a d'ailleurs permis de se rapprocher de la représentation de la réalité par des méthodes mathématiques de perspective qu'ils avaient mises au point. Il est le premier peintre à comprendre vraiment l'oeuvre de Giotto  et à achever ce qu'il a entrepris. Il représente l'espace à trois dimensions et y fait évoluer des personnages dont la forme suggère tout le relief que pourrait leur conférer la sculpture en rond bosse. Appliquant, avec une correction parfaite, les règles de la perspective qu'on vient de découvrir, il s'évertue à trouver les raccourcis les plus osés, en quoi son excellente connaissance de l'anatomie le sert remarquablement. Il est aussi l'un des premiers peintres à représenter le nu d'une façon anatomique exacte. Malheureusement, beaucoup de ses oeuvres ont disparu et celles qui nous sont restées sont souvent et très mauvais état de conservation. L'oeuvre la plus ancienne est la triptyque réalisé pour l'église San Giovenale in Cascia (Reggello).
Le panneau central, "la Vierge à l'Enfant", dénote encore la manière médiévale. En 1424-1425, il réalise pour l'église Sant' Ambrogio à Florence "Sainte Anne", "la Vierge et l'Enfant avec des anges" (Musée des Offices, Florence) probablement exécuté avec Masolino. Il semblerait que sainte Anne, empreinte de résurgences du gothique, ait été peinte par Masolino, tandis que "la Vierge", personnage monumental, l'ait été par Masaccio. Les deux artistes collaborent encore dans la réalisation du polyptyque peint en 1426 pour l'église des Carmes de Pise. Jusqu'à 
présent, onze panneaux seulement ont pu être identifiés. Ils sont aujourd'hui dispersés. Les parties les plus importantes sont le panneau central, "la Madone aux anges", (National Gallery, Londres) et "la Crucifixion" (Musée Capodimonte, Naples) qui surmontaient l'ensemble à l'origine. Par sa composition et son effet de clair-obscur, cette dernière témoigne d'une grande impression dramatique et émotionnelle: ayant été conçue pour être vue d'en bas, les dimensions sont de plus en plus réduites vers le haut du tableau, de sorte que les clavicules du Christ projettent leurs ombres jusqu'aux côtés du visage qui les surplombe.
Mais le chef-d'oeuvre de Masaccio est conservé dans la chapelle Brancacci (du nom de son commanditaire, Brancacci, un marchand de soieries)  de l'église Santa Maria del Carmine à Florence, commencé en 1424 par Masolino. Il a été poursuivi de 1426 à 1428 par Masaccio et terminé à la mort de celui-ci par Filippino Lippi. Masaccio prit pour sa part "la Prédication de saint Pierre, Adam et Eve chassés du Paradis terrestre, Saint Pierre baptisant, Saint Pierre et saint Jean faisant l'aumône, Saint Pierre guérissant les malades et le Paiement du Tribut".
Cette dernière pièce maîtresse est inspirée du Nouveau Testament. Elle touche particulièrement les Florentins, sollicités pour payer des impôts afin d'organiser une défense contre l'armée milanaise. Tous les personnages forment un groupe impressionnant, assez fruste mais monumental. La lumière vient de droite et délimite l'assemblée dans l'espace, tandis qu'au loin Masaccio peint le premier paysage crédible depuis l'époque romaine.
La décoration de cette chapelle témoigne d'une nouvelle conception du mouvement et d'une émotion réelle. Elle sert d'exemple à ses contemporains autant qu'à ceux des générations ultérieures, tels que Michel-Ange qui, dessinant d'après ces fresques, a été le premier à comprendre l'importance de l'art de Masaccio.
"La Trinité" est la dernière oeuvre de Masaccio. Elle a été exécutée en 1426-1428 pour l'église Santa Maria Novella de Florence. Là encore, il se montre révolutionnaire en appliquant de nouveaux principes dans la perspective linéaire: les personnages du premier plan se trouvent devant une voûte qui se creuse avec un tel réalisme, qui donne une telle impression de profondeur que les murs semblent s'effacer sous les pinceaux de l'artiste. Masaccio meurt quelques semaines après avoir terminé cet ouvrage, à l'âge de vingt-huit ans.

Alessandro Filipepi, dit Botticelli Sandro(1445-1510, né et mort à Florence)<<

Alessandro Filipepi doit son surnom "Botticelli" de son frère aîné, Giovanni, quye ses intimes appelaient, à cause de son embonpoint, "il Botticello", c'est-à-dire "le petit tonneau". Fils d'un tanneur au Borgo d'Ognissanti, il fait un bref apprentissage dans l'atelier d'un autre de ses frères, orfèvre, puis à partir de 1465, chez Filippo Lippi. Il est probable qu'il a fréquenté l'atelier de Verrocchio. Dès 1470, Botticelli ouvre son propre atelier. Il devient le peintre le plus célèbre de Florence, le portraitiste le plus réputé de la Renaissance italienne. Son art marque à la fois l'apogée et la fin de la peinture florentine du Quatroccento. Il peint des portraits, non seulement chaque fois qu'on lui en passe commande, mais encore et surtout, quand il traite des sujets religieux. Suivant la mode du temps, il choisit, pour chacune de ses figures, un modèle vivant. Aussi, dans son "Adoration des Mages", peinte vers 1476-77 à Santa Maria Novella représente-t-il Cosme de Médicis dont il est le protégé et sa famille.
L'Adoration des Mages

De cette période date le portrait posthume de "Julien de Médicis" (National Gallery, Washington), pour lequel il a déjà peint l'étendard en 1475. Les toiles de cette veine se caractérisent par une grande distinction dans le dessin des formes et par autant de discrétion dans l'expression des sentiments; elles attachent beaucoup d'importance au décor. Les personnages et les objets ont une profondeur spatiale jamais encore atteinte. Qu'il peigne des portraits ou compose des allégories, ses personnages féminins sont exceptionnels par leurs traits mélancoliques et leur aspect frêle et délicat. Aussi, toujours à la demande des Médicis, ses mécènes, peint il bun grand nombre de sujets de ce genre. Parmi les tableaux, commandés pour la décoration des villas, "Le Printemps" vers 1478 et "a Naissance de Vénus", qui lui est postérieure (tous deux au Musée des Offices, Florence). Ce dernier est inspiré par une description de Pausanias d'un tableau d'Apelle, le plus illustre des peintres grecs anciens. Le peintre a représenté la déesse de l'amour naissant de l'écume de la mer. Un charme indéfinissable émane de la mise en page tout à fait originale, exprimée avec une pureté des lignes et une rigueur dans le dessin. La Renaissance humaniste est manifeste avec la double affirmation de la sensualité alliée aux valeurs spirituelles. La toile est porteuse d'une poésie à la  fois rayonnante et énigmatique.
Botticelli se montre également un excellent peintre de fresques. En 1480, il réalise les peintures murales de l'église d'Ognissanti. Son évocation de "Saint Augustin dans sa cellule" prouve son grand art. En 1484, il termine trois grandes décorations à l'intérieur de la Chapelle Sixtine qui lui avaient été commandées trois ans auparavant par Sixte IV: deux sont consacrées à des "Episodes de la Vie de Moïse", la troisième à "la Tentation du Christ".
La Madone du Magnificat - Botticelli
De retour en Toscane, Botticelli reçoit la commande de nombreux tableaux religieux. Parmi ceux-ci, "le Retable de saint Barnabé" (Musée des Offices, Florence) et, surtout des Vierges conservées dans les musées de Florence, Milan et Berlin comme "la Madone du Magnificat" ou "la Madone à la Grenade" (Musée des Offices, Florence).
A cette époque, la prédication de Savonarole exerce une influence décisive sur son évolution artistique. Il abandonne définitivement toute la mythologie. Son oeuvre la plus importante, après 1490, est sans doute l'illustration sur parchemin de "la Divine Comédie de Dante" (Kupferstichkabinett, Berlin et Bibliothèque vaticane, Rome). En 1492, la mort de son mécène, Laurent de Médicis, suivie, six ans plus tard, par l'exécution de Savonarole, déclenche un changement important dans le travail du peintre. Sa manière devient maniériste et formelle. Les commandes se font rares et Vasari parlera de son esprit "sophistiqué". L'unique toile signée et datée au début du XVIème siècle est "la Nativité mystique", 1501 (National Gallery, Londres). Après avoir fait partie en 1491, d'une commission chargée d'étudier les projets pour la façade du Dôme avec Ghirlandaio, le Pérugin et Di Credi, il est à nouveau sollicité pour désigner l'emplacement du "David" de Michel-Ange
Il meurt dans la pauvreté.

Vittore Carpaccio, (1455-1525, né et mort à Venise)

Carpaccio est l'un des plus grands peintres de l'école vénitienne de la fin du XVème et du début du XVIème siècle. Bien que ses oeuvres subissent l'influence de Giovanni Bellini, on ne peut pas dire avec certitude qu'il ait été son élève. Comme lui et tous les peintres vivant à Venise, carrefour avec l'Orient, il partage le même goût de l'exotisme. Il est le peintre attitré des colonies albanaises et illyriennes. La suite des sept tableaux dont il décore la salle de réunions des Slaves de Venise, "San Giorgio degli Schiavoni", réalisée de 1502 à 1510, illustrant "les Vies de saint Georges, saint Jérôme et saint Tryphon", est, par la douceur de la lumière comme par l'aspect pittoresque des costumes, une oeuvre d'orientaliste.
Le Triomphe de saint Georges

En même temps que peintre des costumes à turbans, Carpaccio est le peintre des cérémonies officielles de Venise dont il devient le chroniqueur. En 1490, il est chargé de la décoration de la Scuola di Sant 'Orsola. Il réalise neuf tableaux relatant "la Vie de sainte Ursule", fille du roi de Cornouailles (Accademia, Venise) demandée en mariage par les ambassadeurs d'un roi païen. Cette série, contemporaine de celle der Memling, n'est pas enfermée, comme les compositions du peintre de Bruges, en de délicates miniatures. Elle se déploie sur des larges tableaux où la sainte est presque oubliée, l'attention de Carpaccio étant toute entière focalisée sur le spectacle des réceptions, embarquements et processions.
Cependant, tout à ses fêtes et ses cortèges, le maître vénitien n'en sait pas moins créer une ambiance particulière en enveloppant ses scènes /d'éclairages à la fois puissants et subtils. Par l'utilisation savante et personnelle de la lumière, il parvient à mêler étrangement la sensation du rêve à l'image de la réalité.
En 1502, Carpaccio reçoit une commande officielle pour la Scala del Pregadi au Palais des Doges dans laquelle il illustre "Le Pape Alexandre II célébrant la Sainte Messe à Saint Marc". De 1511 à 1520, il peint à la Scuola di San Stefano à Venise, de nombreuses versions sur l'histoire de saint Etienne. Il a su laisser une vision à la fois exacte et poétique de sa ville natale, tout en apportant des solutions aux problèmes de l'espace et en créant une harmonie nouvelle entre paysages et personnages.


Filippino Lippi, (1457-1504, né à Prato et mort à Florence)

Filippino Lippi est un peintre italien de l'école florentine de la Renaissance, fils du peintre Fra Filippo Lippi et de Lucrezia Buti, une ancienne carmélite qui servait à celui-ci de modèle. 
Après avoir travaillé successivement sous la direction de son père, Filippo Lippi, et de Botticelli, Filippino Lippi est indépendant à partir de 1481, environ.
"Le plus grand éloge qu'on puise faire de Filippino", dit un catalogue du Louvre, c'est qu'il a démontré maintenant les superbes fresques du "Crucifiement de saint Pierre et de saint Paul devant le Proconsul", dans la chapelle Brancacci à Santa Maria del Carmine de Florence, attribuées si longtemps à Masaccio, ont été exécutées par lui, entre 1484 et 1485, à l'âge de vingt-quatre ou vingt-cinq ans.
"Apparition de la Vierge à saint Bernard"

Les peintures de cette chapelle fonty époque dans l'histoire; c'est d'elles que date le commencement de l'art moderne. Commencées par Masolino, continuées par Masaccio, terminées par Filippino, elles furent étudiées successivement par les plus éminents artistes tels que 
Verrocchio, Domenico Ghirlandaio, Léonard de Vinci, le Pérugin, Fra Bartolomeo, Michel-Ange Buonarotti, Raphaël Sanzio, Andrea del Sarto, etc..
Lippi s'est également illustré à Rome où il peint en 1488, "une Vie de saint Thomas d'Aquin" dans la chapelle Caraffa de Sainte-Marie-de-la-Minerve 
 et dans le cloître de la Campora, avec son "Apparition de la Vierge à saint Bernard", exécutée en 1485/86 qui passe pour son chef-d'oeuvre.


Filippo Lippi, dit Fra Filippo (1406-1469, né à Florence et mort à Spolète)

Fra Filippo Lippi, dit Fra Filippo del Carmine, né en 1406 à Florence et mort le 9 octobre 1469 à Spolète, est un peintre florentin de la Première Renaissance. Il est, avec Fra Angelico et Domenico Veneziano, le principal peintre actif à Florence appartenant à la génération qui a suivi les traces de Masaccio.
Il fut orphelin à deux ans, passe sa jeunesse dans le couvent des Carmes de Florence, où il a le loisir de se familiariser avec les fresques de Masaccio. "La Confirmation de la Règle des Carmes" qu'il réalise en 1432, pour le cloître du couvent, s'en inspire beaucoup. Deux ans plus tard, le fond bleu de ses fresques remplace l'or gothique. Sa vie est féconde en événements romanesques: après avoir été fait prisonnier par des corsaires, alors qu'il se promenait le long du rivage, et réduit en esclavage pendant dix-huit mois en Barbarie, Lippi gagne sa liberté en traçant sur un mur blanc avec un charbon de bois le portrait de son maître, revêtu d'habits mauresques.
"la Vie de saint Jean-Baptiste et de saint Etienne"
Plus tard, en 1456, les religieuses du couvent Santa Margherita lui ayant commandé un tableau, il aperçoit une jeune novice qu'il prend pour modèle pour exécuter la Vierge d'un retable (Musée de Prato). Devenu amoureux, le moine l'enlève le jour où elle doit prononcer ses vœux. Ils auront ensemble un fils, Filippino, peintre habile et célèbre qui s'illustrera par ses fresques à Florence.
Proche de Fra Angelico dont il se rapproche parfois par le coloris, Filippo Lippi exécute la décoration à fresques  du chœur du Dôme de Prato (1452-1464) consacrée à "la Vie de saint Jean-Baptiste et de saint Etienne", et qui sera son oeuvre la plus importante.
Par l'organisation d'une composition sava    nte, l'exploitation des jeux d'ombres et de pénombres, il marque une nouvelle orientation prise par le dessin, qui correspond à une deuxième tendance picturale, déjà amorcée par Masaccio. Il annonce le Cinquecento et le classicisme florentin.





Carlo Crivelli, (1430-1495, né à Venise et mort à Ascoli)

Le Couronnement de la Vierge
Crivelli est l'un des nouveaux peintres de la Renaissance. Son dessin énergique produisant des figures aux contours nets, parfois durs, témoignent de l'influence du gothique tardif. Souvent, il a une prédilection pour dessiner des objets ou des détails d'objets ou des corps qui se détachent en relief sur l'arrière-fond de la toile. Son coloris est chaud, aux contrastes vigoureux, sans que l'ensemble n'y perde jamais de son harmonie. Les personnages aux expressions parfois extatiques, ainsi que les raccourcis adoptés pour rendre l'architecture, traduisent le maniérisme de ce début de la Renaissance. Crivelli a peint à la détrempe durant toute sa vie, se refusant à adopter la technique de la peinture à l'huile, devenue pourtant une pratique courante.
En 1482, il réalisa à Massa Fermana, le polyptyque, "la Madone entre quatre saints", en 1473 (Pinacothèque de Brera, Milan), puis deux autres pour l'église San Domenico,. Son oeuvre la plus caractéristique est, sans conteste, "le Couronnement de la Vierge"  (Pinacothèque de Brera, Milan).


Domenico Veneziano, dit Domenico di Bartolomeo (1410-1461, né à Venise et mort à Florence)

Parmi les quelques détails concernant sa biographie qui nous soient parvenus, figurent deux documents. Le premier, daté de 1438, est une lettre adressée à Pierre de Médicis; prétendant être l'égal de Filippo Lippi et de Fra Angelico, il souhaite être introduit auprès de Cosme, son père. Le deuxième document, daté de 1439, est une note d'honoraires concernant les fresques exécutées pour l'hôpital Santa Maria Novella dans le chœur de Sant 'Egidio, un travail qui n'a pas été conservé.
"La Vierge et l'Enfant"
Il est possible de lui attribuer avec certitude "le Retable de Santa Lucia dei Magnoli" à Florence, représentant "La Vierge et l'Enfant" daté de 1445, dont les prédelles sont dispersées dans les musées de Florence, Berlin, Cambridge et Washington. Cette oeuvre permet de lui attribuer également le superbe tondo de la Gemäldegalerie Dahlem de Berlin, "l'Adoration des Mages "(1430-1435), ainsi que trois portraits: "Matteo Olivieri" (National Gallery, Washington), "Michèle Olivieri "(Collection particulière, New York), et "Un profil de dame" (Gardner Museum, Boston).
Domenico Veneziano est à Florence lorsque Uccello se livre à ses expériences de perspective. Cependant, ses propres innovations sont à chercher sur le plan de la couleur et de la technique à l'huile (Vasari lui attribue, à tort, l'introduction de la peinture à l'huile en Toscane , dont Antonello da Messina lui a, paraît-il, communiqué le secret. Il se montre encore très proche du gothique international, bien qu'on puisse déceler par sa palette de couleurs, unique à son époque, inscrite dans une composition où s'installe une nouvelle approche de la perspective, les différents éléments de la pré- Renaissance florentine.




Francesco Raibolini, dit Francia (1450-1517, né  et mort à Bologne)

Francesco Raibolini est mis, de bonne heure, en apprentissage chez un orfèvre de Bologne. Il acquiezrt rapidement une grande réputation pour ses nielles. Il débute sa carrière de peintre grâce à Lorenzo Costa qui propagea à Bologne les oeuvres de l'école de Ferrare et les enseignements de l'école de Padoue
"Vierge à l'Enfant"
; il puise son inspiration dans des thèmes religieux. Il exécute de petits retables comme "le Saint François" de la galerie Borghèse à Rome et des "palas" pour les églises de Bologne. On raconte que quand Michel-Ange était à Bologne, Francia, qui ne connaissait pas encore ses ouvrages, vint visiter la statue de Jules II, en cours d'exécution. Michel-Ange lui ayant demandé son avis, il répondit que c'était un très beau jet et qu'il avait employé une belle manière. Cette réponse paraissant faire l'éloge du bronze plutôt que celui de l'artiste, ce dernier répliqua: "J'ai, au pape Jules, qui me l'a donnée, la même obligation que vous avez aux marchands qui vous vendent vos couleurs". Et, il ajouta, en se tournant vers les gentilshommes présents, que le Francia était un sot. Ce n'est pas l'opinion de Raphaël qui tint au contraire Francia en grande estime, et dit, en parlant de ses Vierges, dans une de ses lettres: "Il n'en existe pas de plus belles, de plus dévotes, et de mieux faites".
Vasari raconte que Francia mourut de douleur de se voir surpassé, lorsque Raphaël envoya à Bologne son tableau de "Sainte Cécile". 

Mais comme Francia était alors âgé de près de soixante-dix ans, il est permis de croire que l'âge y était aussi pour quelque chose.


Domenico di Tommaso Bigordi, dit Ghirlandaio (1448-1494, né  et mort à Florence)

Domenico di Tommaso Curradi di Doffo Bigordi, appelé couramment Domenico Bigordi dit Domenico Ghirlandaio, né le 2 juin 1448 à Florence et mort de la peste le 11 janvier 1494 à Florence, est un peintre de l'école florentine. Fils d'un orfèvre, Domenico commence l'apprentissage de cette technique, lorsque son oncle, Alesso Bigordi, le prend dans son atelier et l'initie  à la peinture et à la mosaïque. Ses deux frères avec lesquels il ouvre une "bottega", ainsi que son beau-frère, Bastiani Mainardi, l'assistent bientôt dans tous ses ouvrages. Leur production est considérable.
Il travaille tout d'abord en 1481-1482, avec ses compatriotes, Cosimo Rosselli et Sandro Botticelli, à la Chapelle Sixtine où il exécute une "Résurrection (disparue)" et "la Vocation des Apôtres Pierre et André". Puis, de retour à Florence, il décore la Salle des Lys au Palazzo Vecchio: "Scènes de l'Histoire romaine et Apothéose de saint Zénobe", vers 1483 (Musée des Offices, Florence). En 1485, il réalise la décoration de la chapelle Sassetti dans l'église Santa Trinità: "Scènes de la vie de saint François et Adoration des Bergers".
Ghirlandaio est ensuite chargé, en 1486, de restaurer les fresques du chœur de Santa L
Maria Novella. Dans "la Vie de saint Jean-Baptiste" qui occupe tout le chœur, la moitié des premiers plans est occupé par les donateurs, les Tornabuoni, cousins des Médicis, par les Médicis eux-mêmes et par leur cour d'humanistes. Tous ces portraits ont un sérieux et une bonhomie qui font penser aux bustes des notables florentins sculptés par Antonio Rossellino ou Benedetto da Majano.
"Le Couronnement de Marie"
 A examiner l'oeuvre de Ghirlandaio, on constate que la majorité de ses sujets sont d'inspirations religieuse. Néanmoins, cette large production de fresques et de tableaux n'en révèle pas moins un portraitiste au talent sûr. En réalité, cres fresques s'illustrant de nombreux portraits d'hommes célèbres sont un témoignage de la vie florentine à l'poque de Laurent le Magnifique. Cette peinture prépare le Cinquecento. Parfois, l'artiste se souvient de Masaccio et même de Giotto. Il laisse aux scènes traditionnelles leur ampleur monumentale mais, en individualisant ses figures, il devient un réaliste dont le style n'est pas sans rappeler celui de l'école flamande contemporaine, celle de Hugo van der Goes notamment.
A noter également dans l'oeuvre de Ghirlandaio deux exécutions remarquables: "le Couronnement de Marie" (Municipio, Narni), son plus grand retable, et le portrait de "Giovanna Tornabuoni", 1488 (collection Thyssen-Bornemisza, Lugano).


Benozzo di Lese di Sandro, dit Benozzo Gozzoli(1420-1497, né  à Florence et mort à Pistoia)

Benozzo Gozzoli, né Benozzo di Lese di Sandro en 1420 ou 1424 à Sant'Ilario a Colombano, près de la Badia di Settimo et mort le 4 octobre 1497 à Pistoia, est l'un des peintres majeurs de l'école florentine dont le chef-d'œuvre est "le Cortège des mages" du palais Medici-Riccardi.
Il doit son surnom à Vasari. Il est d'abord apprenti orfèvre chez Ghiberti et travaille sous sa direction aux portes du Baptistère de Florence.
Au début de sa carrière, il assiste Fra Angelico, avec lequel il peint en 1447-1449 les fresques de la chapelle Nicolas V au Vatican. Après l'avoir suivi à Rome et à Orvieto, il devient, à partir de 1450, maître indépendant et peint des fresques à Montefalco, en Italie centrale, pour le couvent de San Fortunato où il réalise une "Vie de saint François" (1452) puis, à Viterbe, l'année suivante, pour les religieuses de Santa Rosa.
"la Procession des Rois Mages à Bethléem"
Sa plus belle oeuvre est sans doute la fresque représentant "la Procession des Rois Mages à Bethléem" (1459-1461), commande des Médicis pour la chapelle de leur nouveau palmais à Florence. Les cavaliers ont les traits des Médicis, de l'empereur byzantin Jean VII Paléologue ainsi que du patriarche de Constantinople. A San Gimignano, il exécute, entre 1463 et 1467, des fresques pour l'église Sant 'Agostino et le Palais communal sur la vie de saint Augustin.

L'autre grande oeuvre de Gozzoli est le décor réalisé à Pise pour couvrir tout un mur du Campo Santo. Là, il passe seize ans de sa vie (1468-1484) à représenter des sujets tirés de l'Ancien Testament, dont il ne reste, aujourd'hui, malheureusement que quelques fragments. Il est aussi l'auteur de plusieurs retables, généralement peu novateurs. L'art de Gozzoli est tout à fait charmant par son sens de ce qui est riche, ample et vivant. Son coloris  est brillant, spirituel et riant, sa technique fine et délicate. Il a exercé une influence sur Lippi et Botticelli.


Pietro di Cristoforo Vannucci, dit Le Pérugin (1445-1523, né  à Città della Pieve et mort à Fontignano)

Pietro di Cristoforo Vannucci, dit le Pérugin (il Perugino), né vers 1448 à Città della Pieve, près de Pérouse dans les États pontificaux et mort en 1523 à Fontignano (frazione de Pérouse), est un peintre italien de la Renaissance appartenant à l'école ombrienne, qui est l'un des maîtres de Raphaël. Il peint surtout des tableaux religieux, multipliant madones élégantes et anges mélancoliques.
Après avoir étudié la peinture à Pérouse, il quitte sa ville natale pour ser rendre à  Florence, dans l'intention de se perfectionner en prenant pour modèles les chefs-d'oeuvre que possède la ville des Médicis. Ses parents étant fort pauvres, il fait ce voyage sans aucune ressource, ne vivant que d'oboles.
Son génie, aiguillonné par la nécessité, triomphez de tous les obstacles: il finit par surpasser tous ses condisciples de l'école de Verrocchio, dont il a dérobé les leçons.
Le Pérugin

Sa première oeuvre datée est un "Saint Sébastien ", 1478 (Eglise de Cerqueto). Le Pérugin connaît bientôt une très grande vogue à Florence.
"Saint Sébastien "

Après un assez long séjour à Florence, Le Pérugin retourne à Pérouse, où il fonde une école, germe de l'école romaine, la première entre toutes les écoles d'Italie. C'est là que le jeune Raphaël lui est présenté par son père, qui croit obtenir une grande faveur en faisant admettre son fils au nombre de ses élèves. Les deux hommes s'apprécient à juste valeur; Le Pérugin pressent rapidement l'immense talent de son élève; en toutes circonstances, Raphaël se plaît à témoigner le plus grand respect pour son maître, qui a été appelé à Rome par Sixte IV, pour décorer au Vatican les voûtes de la salle Saint Charlemagne (Baptême du Christ et La Remise des clefs à saint Pierre, 1481). 
"Son style, dit Lanzi, est un peu rude et un peu sec, ainsi que celui de tous les peintres de son temps. Il semble aussi un peu mesquin dans sa manièrev de vêtir ses figures, mais il compense ces défauts par l'agrément de ses têtes, particulièrement celles des jeunes gens et des femmes, dans l'exécution desquelles il surpassa tous ses contemporains, par la grâce de ses mouvements et l'éclat de la couleur. Ces fonds d'azur, qui font si bien ressortir les figures, ce rosé, ce verdâtre, ce violet, qu'il sait fondre si parfaitement ensemble; ces paysages d'une si admirable perspective et dont on n'avait pas encore vu d'exemple à Florence; ces édifices si bien conçus, si bien posés, offrent autant de détails charmants qu'on voit toujours avec plaisir". 
"Mariage de la Vierge"

Le Pérugin exécute un grand nombre d'oeuvres soit à fresque soit à l'huile. C'est à Florence, à Naples, à Rome, et surtout à Pérouse qu'on trouve la plupart de ses productions. Son tableau du "Mariage de la Vierge", 1501 (Musée des Beaux-Arts, Caen) est un des plus curieux qu'offre la ville de Pérouse; c'est pour ainsi dire la synthèse de tous ses ouvrages, auxquels on peut reprocher de se ressembler trop. Ses fresques du Collegio del Cambio de Pérouse (1497-1500) sont l'une des plus belles réussites. Il faut mentionner également parmi ses plus belles oeuvres le tondo du Louvre ("Vierge à l'Enfant trônant entre sainte Rose et sainte Catherine (1488-89),"la Déploration du Christ", 1495 (Palais Pitti, Florence) et "le Combat entre l'Amour et la Chasteté" (Musée du Louvre, Paris), peint pour Isabelle d'Este qui l'a appelé à son service.
Toutes ces toiles, baignant dans une atmosphère de rêve et de paix, visant à l'équilibre parfait  de la composition préparent le style qui sera celui de pleine Renaissance. Certains historiens racontent que Le Pérugin est mort de la peste. En réalité, il se pourrait que son avarice lui ait été fatale. Il avait l'habitude de porter toujours avec lui une petite cassette qui contenait tout son argent. Son domestique, instruit de cette habitude, l'attendit un soir bau détour d'une rue isolée pour le dépouiller et le frappa de plusieurs coups de pouignard. Il mourut des suites de ses blessures à l'âge de soixante-dix-huit ans en laissant un important retable à Sant' Agostino de Pérouse, inachevé.


Pietro di Benedetto di Franceschi, dit Piero della Francesca ou Piero Borgliese (1410-1492, né  et mort à Borgo San Sepolcro, Toscane)

Il ouvre en peinture une ère nouvelle en développant les acquis d'Andrea del Castagno et de Paolo Uccello.
"Le Duc d'Urbino, et son épouse"
Savant en géométrie et en perspective, comme peut en témoigner ses écrits techniques rédigés les dix dernières années, il étudie la nature avec une précision d'anatomiste. Après avoir suivi un enseignement artistique dans sa ville natale, il travaille probablement à Florence avec Domenico Veneziano. Vers 1439, ils décorent à fresque Sant' Egidio. Aidé par sa formation et son goût pour les mathématiques appliquées aux beaux-arts, il rejoint les peintres florentins dans leur préoccupation à résoudre les problèmes de perspective depuis Masaccio. Il réussit ainsi, à merveille, avec des éléments décoratifs plans, la peinture à trois dimensions. Dans ses six grandes fresques d'Arezzo exécutées de 1452 à 1459 pour l'église San Francesco qui racontent l'Histoire de l'invention de "la Vraie Croix", son oeuvre majeure, Piero della Francesca groupe, avec un art consommé du raccourci, des chevaux et des guerriers; il baigne les personnages et les vastes paysages des fonds dans une lumière limpide dont ses successeurs ne sont pas parvenus à retrouver l'éclat. Habile à profiter des moindres effets de lumière, désireux de traduire un certain réalisme, Piero della Francesca est en contraste violent avec l'esthétique de ses prédécesseurs. Son diptyque qui contient les portraits  de "Federico da Montefeltro, duc d'Urbino", et de son épouse "Battista Sforza (Musée des Offices, Florence), peint lors d'un séjour à Urbino vers 1465 est tout à fait révélateur en ce sens. Saisis en buste et de profil, détachés, comme le sont les portraits flamands, sur un fin paysage, les personnages sont détaillés avec un réalisme implacable. Il faut citer également dans l'oeuvre de Piero della Francesca, la place que prend l'architecture: dans "le Baptême du Christ", vers 1448-50 (National Gallery, Londres) ou dans le terrible portrait de "Sigismondo Malatesta à genoux devant saint Pandolfo", signé et daté "Petri de Borgo opus 1451", réalisé pour le temple de Malatesta à Rimini, et encore dans "la Flagellation", peinte vers 1460 à Urbino à la demande de Federico de Montefeltro (Galerie nationale, Urbino). Le réseau de l'architecture et du carrelage, réalisé avec une parfaite maîtrise de la perspective, frappe par l'harmonie et révèle l'influence d'Alberti, rencontré à Urbino. Quant aux personnages peints dans des couleurs à la fois sobres et intenses, ils sont en parfait équilibre avec leur environnement.
Après Piero della Francesca, la peinture ombrienne se divise, à peu près comme la peinture florentine, en deux écoles: d'un côté, se rangent les maîtres vigoureux et virils, ses héritiers directs et naturels, tels Luca Signorelli; de l'autre naît, une manière douce, aimable et facile, celle de l'école de Pérouse, avec pour maître Gentile da Fabriano.



Piero di Lorenzo dit Piero di Cosimo(1462-1521, né   et mort à  Florence)

Son apprentissage terminé, Piero di Lorenzo substitue le nom de son maître, Cosimo Rosselli, au sien propre. Lorsqu'en 1481 Rosselli part à Rome pour travailler à la Chapelle Sixtine, Piero l'accompagne pour l'assister dans ses travaux. Influencé par Léonard de Vinci, Filippino Lippi, Signorelli, Ghirlandaio et les flamands tels que Van Der Goes, il s'enthousiasme bientôt pour les mythes de l'Antiquité classique et donne des toiles aussi belles que "la Mort de Procris" (National Gallery, Londres), "Andromède délivrée par Persée" (Musée des Offices, Florence).

"Andromède délivrée par Persée"
 "Vénus, Mars et l'Amour endormi", (Staatliche Museen, Berlin), au sein duquel animaux, fleurs et papillons évoluent dans une atmosphère de rêve, est son chef-d'oeuvre.
Piero di Cosimo a également peint des tableaux religieux tels que "la Vierge et l'Enfant", vers 1480 (Collections royales, Stockholm), ou "la Sainte Famille (Musée de Dresde). Parmi ses portraits pris sur le vif, le plus remarquable est sans contexte "le Portrait de Simonetta Vespucci", peint en 1520 (Musée Condé, Chantilly). Les courbes des nuages mêlées à la chevelure et au serpent placé autour du cou forment un jeu d'arabesques subtil et délicieux.
Doué d'une très vive imagination, maître absolu d'un métier et d'une technique incomparables, il a déploré l'indifférence de la nature devant la laideur et l'injustice de la mort ("Mort de Procris"), s'est insurgé contre le destin tragique de l'être humain ("Simonetta Vespucci), a pleuré l'amertume du sacrifice, beau en soi, mais totalement inutile ("Immaculée Conception"). Les paysages constituant l'arrière-plan de ses toiles révèlent un observateur méticuleux (ce qui l'a fait considéré comme un marginal par ses contemporains) doté de facultés créatrices incomparables, faisant de lui un des plus grands précurseurs du surréalisme. Il a été le maître d'Andrea del Sarto.


Bernardino di Betto, dit Pinturicchio(1454-1513, né   à Pérouse et mort à  Sienne)

Parmi les peintres qui ont précédé Raphaël, il faut citer Pinturicchio (Le "Peinturlureur"), qui a eu une grande réputation, mais dont la renommée s'est éclipsée derrière celle du peintre d'Urbino. D'abord élève de Fiorenzo 18di Lorenzo, il collabore plusieurs reprises avec Le Pérugin à Pérouse, aux "Miracles de saint Bernardin de Sienne" (1473) et à Rome, à la Chapelle Sixtine, dans les fresques représentant "la Circoncision du fils de Moïse", et "le Baptême du Christ" (1481-1483). Son oeuvre présente un caractère monumental très poussé et une extrême fidélité dans les détails, faisant songer au travail du miniaturiste. Son chef-d'oeuvre est la décoration de la bibliothèque du Dôme de Sienne, "La Libreria Piccolomini" (1502-1507). Il y a là dix fresques dont le sujet est emprunté à la vie d'Aeneas Silvius Piccolomini, qui fut pape sous le nom de Pie II.
"La Libreria Piccolomini"

Selon Vasari, la composition de ces fresques devraient revenir à Raphaël. Cette opinion peut être soumise à controverse: en effet, à cette époque, Pinturicchio a alors quarante-neuf ans et il est dans toute la force de son talent et de sa réputation. Selon l'usage de presque tous les artistes de la Renaissance, il a employé des jeunes pour l'aider dans cet immense travail et Raphaël, qui a alors vingt ans, a été son collaborateur. Il est clair, cependant, que Pinturicchio a gardé son sentiment personnel.
Pinturicchio a également exécuté les fresques de l'appartement du pape Alexandre VI Borgia, en 1492-94, qui expriment un goût pour l'art fastueux et dans lesquelles ors et fioritures servent à masquer la faiblesse du dessin.



Antonio Pisano, dit Pisanello (1395-1455, né à Pise et mort à  Rome)

Pisanello, de son vrai nom Antonio di Puccio Pisano, ou Antonio di Puccio da Cereto, né à Pise  vers 1395 et mort à Rome vers 1455, est un peintremédailleur et enlumineur de la Renaissance italienne et du Quattrocento, dernier représentant du style gothique international.
Pisanello est initié à la peinture dans l'atelier de Stefano da Verona où il reçoit la double influence du gothique lombard et du gothique international. Arrivé à Venise en 1417, il devient sans contexte l'héritier de Gentile da Fabriano avec lequel il travaille pour la salle du Grand Conseil du Palais des Doges. "Otto de Wittelsbach devant l'empereur Frédéric Barberousse " (1415-1420) est sa première oeuvre d'importance.
En 1431-1432, il termine les fresques de Saint-Jean-de-Latran à Rome, laissées inachevées par Fabiano.
En 1420, l'art de Pisanello atteint sa maturité avec les fresques véronaises de Sant' Anastasia où il dépeint la légende de saint Georges: "Saint Georges délivrant la princesse de Trébizonde", peint entre 1435 et 1438, à la facture précieuse, n'est pas sans rappeler Altichiero.
Princesse d'Este

Désormais célèbre, il est demandé par toutes les cours d'Italie: à Milan, en 1440, à Rimini en 1445, à Naples en 1449, à plusieurs reprises, à Mantoue et à Ferrare. Il se livre alors à une activité de portraitiste et de médailliste. Le portrait qu'il exécute de la Princesse d'Este, vers 1433 (Musée du Louvre, Paris), ou celui de "Lionello d'Este", vers 1441 (Accademia Carrara, Bergame) rappelle, par le caractère précieux de la décoration, le gothique international. Pisanello est sans doute le dernier représentant italien du style "courtois" qui a conquis l'Europe à la fin du XVIème siècle.







Paolo di Dono, dit Paolo Uccello (1397-1475, né à Pratovecchio et mort à  Florence)

Né à Pratovecchio près d'Arezzo, il fut surnommé Uccello à cause de l'amour qu'il met à peindre toutes sortes d'oiseaux, est une des grandes figures du Quattrocento florentin. Il a de multiples talents à son registre: peintre, mosaïste, marqueteur et décorateur. En 1407, il travaille déjà dans l'atelier du sculpteur Lorenzo Ghiberti, chez lequel il restera jusque vers 1414-1415, comme "garzone di bottega". En 1425, il devient maître mosaïste de l'église San Marco à Venise. On ignore qui lui enseigna la peinture.
Parmi ses premières oeuvres picturales, il faut noter une "Nativité", 1425 (National Gallery, Londres), un "Saint Pierre", 1425, (Museo di San Marco, Venise) et un "Portrait équestre de Sir John Hawkwood", commandé pour la cathédrale de Florence, daté de 1436, qui est le premier en date parmi les portraits du genre que la peinture renaissante nous a légués. Se présentant comme une peinture en trompe-l'œil, l'effet de relief est rendu par le jeu des ombres. Uccello exécute également d'autres oeuvres pour la cathédrale. Il peint quatre têtes de prophètes pour l'horloge et réalise entre 1443 et 1445, trois cartons de vitraux pour les oculus de la coupole représentant "l'Ascension", "la Résurrection" et "la Nativité" et l'année suivante, un quatrième, "l'Annonciation".
De cette même époque, datent deux de ses oeuvres les plus fameuses, exécutées pour le cloître de Santa Maria Novella de Florence: "le Déluge" et "l'Ivresse de Noé" dans lesquels Uccello découvre par la perspective une vision plastique nouvelle qu'avait déjà pressentie Masaccio. Le sens abstrait et le caractère ornemental qu'il accorde à ses fresques sont tels qu'il n'hésite pas à peindre les prés en rouge et les villes en bleu. Cette utilisation de la perspective comme jeu, faisant apparaître les oeuvres comme des constructions géométriques, trouve son aboutissement dans "la Bataille de San Romano" (1456).
"la Bataille de San Romano" 

Commandé par Cosme de Médicis, les trois panneaux (actuellement à Londres, Paris et Florence) formaient un ensemble décorant une pièce du palais Médicis. Dans cette oeuvre célébrant la victoire de Florence sur Sienne en 1432, Uccello montre une puissante originalité: les chevaux (peints dans des couleurs inhabituelles, bleu et rouge) ainsi que les guerriers, sont représentés dans des raccourcis très audacieux. L'ensemble, régi par des règles géométriques rigoureuses, est une parfaite illustration de l'intellectualisme de l'esprit florentin, épris de la géométrie pythagoricienne dont Uccello, surnommé "le fou de perspective", est le fervent défenseur. Par cette nouvelle approche de la peinture, il se montre le précurseur du cubisme et de l'art abstrait. Pourtant, Uccello n'est pas reconnu de son vivant. Son intérêt pour les sujets légendaires et la représentation d'animaux, qu'il a été le premier à peindre dans un espace à trois dimensions, fait de lui un grand naturaliste avant l'heure. Dans ce genre, il faut retenir les deux versions de "Saint Georges et le Dragon" peint vers 1456 (National Gallery, Londres et Musée Jacquemart-André, Paris), ainsi que les fresques du palais Peruzzi, représentant "les Quatre éléments" sous la forme de quatre animaux.


Cosmè Tura (1430-1495, né et mort à  Ferrare)

Cosmè Tura ou Cosimo Tura est un peintre du XV siècle, sujet du marquis de Ferrare. Certains historiens s'accordent à lui donner les dates de 1420-1430 comme années de naissance. Il est difficile en effet d'en trouver une date exacte puisque les seuls premiers documents parlant de Cosmè datent de ces années là. Il est mort en 1495.
Il a probablement était l'élève de Michele Pannonio. Il subit l'influence d'Andrea Mantegna, qu'il rencontre probablement dans l'atelier de Squarcione, dans le rendu du paysage et de l'architecture.
"l'Annonciation" 
Tura a été sa vie durant le peintre officiel de la cour de Ferrare, du duc Borso d'Este tout d'abord, puis de son successeur, Ercole. Pour eux, il décore entre 1460 et 1463, le cabinet de travail du Palais di Belfiore, puis en 1469-1470, il supervise la décoration du Palais Schifanoia. Les documents qui subsistent permettent de dater certaines de ses oeuvres les plus célèbres et les plus importantes réalisées à cette époque: "Saint Georges" et "l'Annonciation" (Cathédrale de Ferrare, 1469) appartiennent toutes deux au retable de l'orgue de la cathédrale; le polyptyque Roverella peint en 1473/74 pour San Giorgio, est aujourd'hui dispersé à la National Gallery de Londres, au Louvre de Paris, à la Galerie Colonna de Rome et dans quatre musées américains.
Par son style profondément inscrit dans les compositions les plus élaborées, il apparaît comme le fondateur de l'école de Ferrare.


Andrea di Michele Cioni dit Andrea del Verrocchio (1435-1488, né et mort à  Florence)

Andrea di Michele di Cione dit Le Verrocchio est un sculpteurpeintre et orfèvre florentin de la seconde moitié du Quattrocento.

Il reçut un nombre important de commandes de Laurent de Médicis, dit "le Magnifique", tenant auprès de lui le rôle que Donatello avait joué auprès de Cosme l'Ancien. Son atelier était alors (avec celui des frères Pollaiolo) le plus important de Florence. Il eut pour élèves Francesco Botticini, Le PéruginLéonard de Vinci, et Lorenzo di Credi.

Verrocchio triomphe, dans ses rares peintures par la maîtrise de la ligne, son gopûtr pour le dessin précis ert nerveux, probablement acquis par sa formation d'orfèvre. Il est l'un des premiers Florentins à comprendre le paysage, le rôle qu'y jouent non seulement les formes, mais l'air et la lumière.
En tant que sculpteur, il est l'auteur du sarcophage de Piero et Giovanni Médicis à San Lorenzo (1472), et d'un "David", 1473-1475 (Musée du Bargello, Florence).


Cosimo Rosselli (1439-1507, né et mort à  Florence)

Elève de Benozzo Gozzoli dont il conserve l'influence, Rosselli peint des retables et des fresques dans un style descriptif. Il est connu pour avoir été le maître de Fra Bartolomeo et de Piero di Cosimo. Son oeuvre principale est une fresque peinte à Sant' Ambrogio de Florence, "le Miracle du Saint Sacrement", vers 1482. Il a participé en 1481 à la décoration de la Chapelle Sixtine (l'Adoration du Veau d'or", "le Sermon sur la Montagne" et "la Cène".


Luca da Cortona, dit Luca Signorelli(1445-1523, né et mort à  Cortone, Ombrie)

Luca Signorelli, Luca d'Egidio di Ventura appelé parfois Luca da Cortona, né à Cortone vers 1450 et mort dans cette même ville le 16 octobre 1523, est un peintre italien de l'école florentine. Il est tout d'abord l'élève de Piero della Francesca. De 1476 à 1479, il exécute les fresques de la sacristie de la basilique de Lorette, que Melozzo a laissées inachevées. Il pousse plus loin encore que son prédécesseur la science anatomique et la culture de la force virile.

Signorelli est sans rival pour interpréter la structure et le mécanisme d'un nu. Il recherche la vérité plutôt que la noblesse de la forme. En ce sens, il est vraiment le précurseur de Michel-Ange.

"Le  Jugement Dernier"

En 1481, il participe à la décoration de la Chapelle Sixtine et y exécute "les Derniers Jours de Moïse".

En 1497, il est invité à peindre dans le cloître de Monte Oliveto Maggiore un décor monumental dans lequel il peut exprimer toute la force de son réalisme. "Les scènes de la vie de saint Benoît" sont remplies de guerriers en armures claires ou en chausses collantes, tous cambrés comme des athlètes.

Devenu célèbre, il est appelé en 1499 par le chapitre d'Orvieto à compléter la décoration de la grande chapelle San Brizio dont la voûtez a été peinte en partie par Fra Angelico, une cinquantaine d'années plus tôt. Dans son "Histoire de l'Antéchrist" et son "Jugement Dernier", il remplit le paradis comme l'enfer d'hommes et de femmes nus, dont la musculature est accentuée dans un ton de bronze, comme sur un écorché. L'oeuvre est dure, aussi violente que saisissante. Elle va s'imposer au souvenir de Michel-Ange en même temps qu'elle influencera des maîtres décorateurs tels que Jules Romains et le Corrège. Parmi les autres oeuvres réalisées par Signorelli, il convient de mentionner une "Madone en tondo", exécutée en 1490 pour Laurent de Médicis (Musée des Offices, Florence), ainsi qu'une "Sainte Famille" de la même époque et "la Circoncision", vers 1491 (National Gallery, Londres).



FLANDRES

Dans les pays du Nord et de l'Ouest, où l'art gothique s'est parfois affaibli par l'esprit de recherche et de maniérisme, commence au XVème siècle à se former un art nouveau. Ici, ce ne sont pas les modèles antiques qu'on imite d'abord; le premier soin des artistes est de s'attacher à l'étude de la nature. Cependant, ils ne la voient ni ne l'expriment comme ceux du XIIIème siècle, où ceux d'Italie, en se montrant en général moins soucieux de la noblesse et de l'harmonie du style, curieux avant tout, de la ressemblance individuelle la plus précise. Ils sont réalistes au vrai sens du mot. L'importance que prend le portrait de toutes leurs oeuvres en est la preuve. Ils n'hésitent pas à peindre la laideur et la vulgarité, la réalité quotidienne dans les aspects triviaux. Pourtant, ils n'ont pas entièrement rompu avec les souvenirs du Moyen Âge: par les sujets qu'ils traitent et par leur foi, ce sont des artistes chrétiens, capables de ressentir et de traduire avec une sincérité naïve, l'inspiration religieuse. Ces caractères et ces contrastes se comprennent, si on considère les origines de cet art. Il naît dans des villes de grosse bourgeoisie et de population dense et ouvrière où ne se trouve pas la finesse du goût italien. Néanmoins, la poésie n'en est pas bannie, elle se concentre dans les sentiments intimes et les croyances qu'elle pénètre de tendresse et de mysticisme.
La Flandre est le pays ù se manifeste d'abord cette évolution de l'art. Elle le doit à sa richesse et à son activité: au sein des grandes cités d'industrie et de commerce, comme Bruges et Gand, se forment les corporations ou guides d'artistes d'où va sortir la rénovation. Puis vient la domination des ducs cde Bourgogne: à leur cour fastueuse ou sous leur protection, travaillent quelques-uns des grands maîtres flamands du XVème siècle. Bien que la Flandre ait eu des sculpteurs de mérite, l'activité créatrice des artistes se manifeste surtout dans la peinture: pas de grandes décorations d'églises ou d'édifices comme en Italie, l'architecture gothique a ruiné la peinture murale et les oeuvres sont des tableaux.
Au XVème siècle et avec les Van Eyck, l'école flamande, déjà préparée par des artistes plus obscurs, se constitue dans toute la force de son originalité.
Van Eyck et la réalité virtuelle

Tandis que les artistes italiens peignent encore à fresque, les frères Van Eyck pratiquent la peinture à l'huile. La tradition leur attribue en effet la découverte de la peinture à l'huile. Si, sous cette forme absolue, l'affirmation n'est pas exacte, cependant les Van Eyck mêlèrent plus habilement qu'on ne l'avait fait encore l'huile aux couleurs, et ils améliorèrent la préparation des vernis qu'on étendait sur les peintures. En outre, ils surent combiner les couleurs sur la palette, multiplier les tons et les nuances. Il obtinrent ainsi un coloris plus riche et plus chaud, et leurs procédés accrurent les ressources de l'art. Aux côtés des frères Van Eyck, deux grand noms dominent la peinture flamande primitive: Van der Weyden et Memling.
L'école de Bruges a eu la grandeur solennelle et la vérité précise. L'école brabançonne, dont le fondateur est Roger van der Weyden, sera moins minutieuse dans le détail, elle recherchera, comme les Van Eyck d'ailleurs, l'effet d'ensemble. Elle dépassera ses maîtres par la puissance de caractère et la profondeur du sentiment dramatique.
Roger Van der Weyden (vers 1400-1464), dont la vie s'est passée en grande partie à Bruxelles, est un artiste dur au dessin et au coloris sec. En revanche, ses oeuvres d'un aspect sévère, excellent par la force de l'expression: ainsi "les Sept Sacrements" (musée d'Anvers) et "le Jugement dernier" (Hôtel de Beaune).
Il a exercé une grande influence en Allemagne comme dans sa patrie; de son atelier sort Hans Memling (1430-1494), qui parmi ces vieux peintres flamands se place à côté des Van Eyck. Sa vie, que longtemps on a ornée de légendes romanesques, est obscure; on sait cependant qu'elle s'écoula en grande partie à Bruges. Là, aussi, à l'hôpital Saint-Jean, sont réunies plusieurs de ses oeuvres: "La Chasse de sainte Ursule", des portraits, "l'Adoration des mages", et surtout "le Mariage de sainte Catherine". Il excelle à donner à ses madones et à ses saints une expression de foi profonde et naïve; son talent est plus tendre, plus pénétré d'idéal que celui de Van Eyck; son dessin n'est pas moins précis ni son coloris moins moelleux, mais peut-être avec plus de grâce a-t 'il moins de force ("La Vierge et la famille Floreins", au Musée du Louvre, Paris). Autour de ces grands maîtres se pressent quelques disciples, comme Dierick Bouts (1415-1475) parfois appelé Stuerbout, et Van der Goes b(1440-1482), l'un des premiers peintres maudits de la peinture. Il mourra fou au couvent de Rouge-Cloître. On ignore où sont passées ses innombrables peintures murales. Son grand triptyque, "l'Adoration des bergers" au Musée des Offices de Florence, a fait connaître l'art flamand aux Florentins. Gérard David (1460-1523) sous la poussée des premières influences, s'oriente vers un modelé doux atteignant parfois la mièvrerie.
Les musées regorgent de peintures attribuées à "l'école flamande du XVème siècle", exécutées par des artistes célèbres en leur temps, qui travaillaient  pour les ducs et les princes. Certains sortent de leur anonymat, tel Petrus Christus (1410-1473) dont la remarquable tête d'homme figurant dans "Le Portrait d'un bourgeois flamand avec sa femme", (au Musée des Offices de Florence), vaut bien un Holbein ou encore Juste de Gand (1435-1480), qui travailla à la cour d'Urbino entre 1465 et 1473 et dont la richesse de couleurs éclate dans une splendide "Cène".
De nombreux maîtres anonymes commencent à sortir de l'ombre: le Maître de sainte Catherine, le Maître de la Légende de sainte Barbe, le Maître de la Vue de Sainte-Gudule ainsi que le aître de Flémalle que certains historiens d'art ont identifié à Robert Campin (1378-1444).
L'art de Jérôme Bosch, né vers 1450, est singulier: bien qu'il vive jusqu'en 1516, il ne s'ouvre nullement aux formes de la Renaissance, et reste gothique par son sens du symbole. Ses trois chefs-d'oeuvre: "Le Char de  foin, la Tentation de saint Antoine ou le Jardin des délices" sont des moralités médiévales.

"Le Jardin des délices"- J. BOSCH

 Pourtant, c'est avec sa génération que s'annonce la nouvelle orientation, avec Quentin Metsys (1466-1530) et Joss van Cleve (1485-1540). Tout en restant attachés aux motifs traditionnels, ils introduisent dans leur peinture des éléments décoratifs ou architecturaux renaissants et s'appliquent à peindre en couches plus transparentes et plus légères.



Hieronymus van Aeken, dit Jérôme Bosch (1450-1516, né et mort à Hertogenbosch, Brabant)

Né au sein d'une famille de peintres, originaire d'Aix-la-Chapelle (Aachen), Hieronymus tire son second nom de la ville de Bois-le-Duc, Hertogenbosch où il vécut et mourut. A l'exemple de son père et de son grand-père, Jan van Aeken, qui avaient peint pour la chapelle de la confrérie de Notre-Dame-de-Bois-le-Duc, Bosch dessine un carton de vitrail en 1493-1494 et, peu de temps après, un triptyque de "l'Epiphanie". Rien ne subsiste aujourd'hui. De la quarantaine d'épreuves qui sont restées, seules sept d'entre elles sont signées. Dès les premières peintures, "La Cure de la Folie", "La Char de foin", son premier grand tryptique, (toutes deux au Musée du Prado, Madrid) ou  "La Nef des fous" (Musée du Louvre, Paris), l'art de Bosch apparaît dominé par la magie et le fantastique. 
La Nef des fous- (J. Bosch)

"La Nef des fous" tire son origine du poème satirique de Sébastien Brandt, que Dürer a également illustré. "Le Char de foin", est l'illustration d'un proverbe flamand: "le monde est une montagne de foin, chacun en prend ce qu'il en peut saisir". Bosch est un observateur au regard perçant, doublé d'un moraliste impitoyable qui jamais ne se laisse attendrir, sauf peut-être, en peignant soit l'un ou l'autre détail d'un paysage, soit une échappée, qui viennent adoucir par-ci, par-là l'austérité de plus d'une de ses oeuvres. Ainsi, il est incontestablement méchant lorsque, dans son "Triptyque des Mages", vers 1495, (Musée du Prado, Madrid), il relègue saint Joseph sous un apprenti qui sert à suspendre le linge. Sans pitié aussi, lorsqu'il peint "le Portement de Croix", vers 1505, (Musée des Beaux-Arts, Gand): les visages grimaçants et sarcastiques des personnages cadrés à mi-corps sont d'un réalisme qui va à l'encontre de la religiosité du thème traité. De la même veine est "le Couronnement d'épines", peint probablement à la même époque (National Gallery, Londres), toile dans laquelle Bosch rompt totalement avec la tradition. Mais aucune oeuvre ne présente satire plus corrosive de l'humanité que "le Jardin des Délices", peint entre 1485 et 1505, qui se trouve déjà à l'Escurial au début du XVIIème siècle. Tous les vices, toutes les passions s'y déploient, chargés de symbolisme médiéval. La peinture de Bosch, malgrè l'analogie des sujets traités, est très différente de celle de ses contemporains tels que Van der Weyden ou Gérard David. Sa technique est tout à fait originale: en peignant ces petits êtres fantastiques, figurines microscopiques qui hantent ses visions infernales, il pose ses couleurs, ton sut ton, sous forme de points, dont la grosseur ne dépasse guère celle d'une tête d'épingle. L'harmonie et la tonalité de ses coloris sont inimitables: il a l'habitude de travailler sur un fond blanc, avec des couleurs d'un ton chaud et intense, mais sensiblement transparentes. Chaque fois qu'il les applique en une couche très mince, sur une toile dûment apprêtée, le ton sous-jacent acquiert une grande importance. Il est le premier peintre néerlandais à exprimer, à travers ses paysages, un état d'âme. "Le Fils prodigue", vers 1510 (Boymans-van Beuningen Museum, Rotterdam), en est un bon exemple. Dans ses tableaux d'inspiration religieuse, l'intérêt se fixe tout d'abord sur les choses semées, puis se déplace pour se concentrer sur les choses humaines, dont le peintre fait une satire imprégnée du pessimisme le plus noir. Dans les oeuvres de sa dernière période, notamment la petite version de "la Tentation de saint Antoine (Musée du Prado, Madrid), Saint Jean à Patmos (Staatliche Museen, Berlin) ou "Saint Jean-Baptiste dans le désert (Musée Lazaro-Galdiano, Madrid), il procède  à une élimination des signes extérieurs de l'inquiétude religieuse qui ne sont plus représentés que par quelques détails, tels que les lutins ou les reptiles.
Les Tentations de saint-Antoine

Célébré de son vivant, il reçoit des commandes de personnages illustres, parmi lesquels Philippe le Beau, le cardinal Grimari, Marguerite d'Autriche qui détient, déjà en 1516, "une tentation de saint Antoine" et Philippe II qui garde dans sa chambre à coucher "les Sept péchés capitaux (Musée du Prado, Madrid). Copié et initié par ses contemporains tels que Bruegel l'Ancien, Jan de Cock ou Patenier, il a fallu attendre le surréalisme pour le redécouvrir.



Robert Campin (1378-1444, né à Valenciennes (France) et mort à Tournai (Belgique)

Il apparaît dans les registres de la ville de Tournai dans les années 1406 et 1444. Ces mêmes documents signalent que le Magistrat de la Cité le chargea de travaux de décoration. Il ouvre probablement un atelier qui attire Roger van der Weyden et Jacques Daret. Robert Campin est généralement identifié sous deux autres noms: Maître de Flémalle, du nom d'une abbaye située dans les environs de Liège, qui en fait n'a jamais existé mais d'où on a cru que provenaient les quatre panneaux conservés sous ce nom, et Maître de Mérode, d'après un triptyque longtemps possédé par les princes de Mérode avant d'être acquis par le Metropolitan Museum de New York.
En 1423, il est élu doyen de la guilde de Saint-Luc, en dépit de sa participation à un conflit mené contre la noblesse de la ville. On ne peut lui attribuer d'oeuvres avec certitude, pourtant l'unité qui se dégage des peintures présumées est suffisante pour reconnaître son style original. Si ses sujets religieux sont réalistes et ont pour cadre les intérieurs bourgeois, il n'en respecte pas moins l'iconographie traditionnelle. Ce naturalisme nouveau va conditionner toute l'évolution de la peinture flamande.
Le Tryptique de Mérode "l'Annonciation"

Parmi ses oeuvres il convient de citer: "Une Nativité (Musée des Beaux-Arts, Dijon), une Vierge en Gloire (Musée des Beaux-Arts, Aix-en-Provence), une Crucifixion (Staatliche Museen, Berlin), une Sainte Barbe et Saint Jean-Baptiste avec un  donateur (Musée du Prado, Madrid)". Mais son chef-d'oeuvre est sans contexte "le Triptyque de Mérode" avec son panneau central de "l'Annonciation", exécuté vers 1425-28.


Petrus Christus (1410-1475, né à Bearle-Duc et mort à Bruges, Belgique)

la Déposition des Croix 
Né à Baerle, près de Gand, Christus devient en 1444 citoyen de Bruges où il a obtenu la maîtrise. Trois ans après, il entre à la guilde de Saint-Luc de la ville. Bien que son style se rapproche beaucoup de celui de Van Eyck, il n'est pas certain qu'il eut ce dernier pour maître. A sa mort pourtant, il reprend l'école est devient maître de l'école brugeoise. Eclectique, il subit aussi l'influence de Roger van der Weyden dans l'expression de l'émotion et de Bouts. On peut croire qu'il visita l'Italie et qu'il fit connaître à Antonello da Messina la technique eyckienne.
Parmi ses oeuvres les plus importantes figure le triptyque comprenant "l'Annonciation, la Nativité et le Jugement dernier" (Gemäldegalerie Dahlem, Berlin) et "la Déposition des Croix (Musée royaux des Beaux-Arts, Bruxelles).
Fin coloriste, il épaissit ses personnages qui, parfois, paraissent grossiers quand on les compare à ceux de Van Eyck, mais son écriture s'affine chaque fois qu'il peint un portrait. Parmi ceux-là, il faut citer "Portrait de jeune femme", vers 1446 (Staatliche Museen, Berlin), et le panneau du retable, "Saint Eloi, orfèvre", 
1449 (Metropolitan Museum, New York), qui ouvre la voie au "Banquier et sa femme" de Quentin Metsys, exécuté en 1514.


Gérard David  (1460-1523, né à Oudewater et mort à Bruges, Belgique)

Gheeraedt, ou Geerart Janszoon, à Oudewater vers 1450, il semble avoir pris le prénom de son père David comme patronyme peu après son inscription à la guilde des imagiers et selliers de Bruges en 1484. C'est  le dernier grand peintre de l'école brugeoise. Probablement formé dans les Pays-Bas du Nord, dans le sillage de Geertgen tot Sint'Jans; leur style est si semblable qu'on les suppose tous deux élèves d'Albert van Ouwater à Haarlem, il s'installe à Bruges en 1483 pour y travailler la majeure partie de sa vie, comma l'avait fait Hans Memling à qui il succède au titre de peintre  officiel de la ville. Il hérite également de lui: l'intensité d'expression, le réalisme plus prononcé dans la peinture de  ses personnages et la disposition dramatique des figures. Il reçoit la protection du roi Ferdinand et d'Isabelle d'Espagne.  Deux oeuvres réalisées de 1488 et 1498 pour la salle du Conseil de l'Hôtel de Ville, "le Jugement de Cambyse" et le "Supplice du juge Prévaricateur Sisamnès" (toutes deux Musée Groeninge, Bruges), font partie des trois seuls retables signés et datés qui ont été conservés. Ces oeuvres font preuve d'un très grand réalisme. Sur des thèmes empruntés à Hérodote, elles rappellent aux magistrats leur devoir de conscience de leur fonction. Sa réputation der grand miniaturiste le fait travailler auprès du duc de Bourgogne. En 1515, Gérard David est à Anvers , où il paye la taxe nécessaire pour entrer à la guilde de Saint-Luc. Là, il rencontre Joachim Patenier et surtout Quentin Metsys qui exerce sur lui une profonde influence. Ses oeuvres perdent de leur intensité dramatique pour céder à l'attrait de l'aimable, voire du gracieux:" la Vierge à la soupe de lait" (Musée royaux des Beaux-Arts, Bruxelles) et "le repos pendant la fuite en Egypte (Metropolitan Museum, New York).
La Vierge entre les Vierges

David s'est surtout montré un excellent peintre de paysage, qui a su influencer la peinture anversoise. Dans "le Retable de Jean de Trompes à Bruges", dans "le paysage d'Amsterdam", il se révèle, dans ses effets de lumière, un véritable poète. Sion chef-d'oeuvre "La Vierge entre les Vierges", 1509  (Musée des Beaux-Arts, Rouen), peint dans une vision sereine et pieuse, annonce déjà à Bruges l'arrivée de la Renaissance.
Citons également de lui "les Noces de Cana", vers 1503 (Musée du Louvre, Paris), et "l'Adoration des Mages" (Musée royaux des Beaux-Arts, Bruxelles), remarquable pour la mise en page, l'ampleur de la composition, l'équilibre harmonieux des formes, la profondeur des coloris aux tons chauds. 


Jan van Eyck (1390-1441, né à Maeseyck et mort à Bruges, Belgique)

Jan van Eyck,  est un peintre né dans le Limbourg, à l'est de la Flandre dans les territoires soumis à l'autorité du prince-évêque de Liège Jean de Bavière, qui devient son protecteur. Il est d'une vingtaine d'années le cadet de Hubert, également peintre. Ils travaillent ensemble dans le même atelier, et la thèse avancée est qu'Hubert commença et composa leur oeuvre capitale et gigantesque (3, 50 m de haut sur 4,60m ouvert), "l'Agneau Mystique" (Cathédrale Saint-Bavon de Gand) en 1426, oeuvre que Jan reprit à sa mort, en 1426, et qu'il termina en 1432. On sait qu'ensemble, s'ils n'inventèrent pas comme on l'a dit, la peinture à l'huile, ils trouvèrent des huiles plus siccatives qui donne aux couleurs une étonnante richesse et une singulière transparence. Le secret de cette nouvelle méthode de peinture, expérimentée entre 1410 et 1420, basée sur l'application d'un mélange d'huile, de vernis et de pigment, sera si bien gardé que les Italiens ne l'apprendront pas avant la fin du XVème siècle.
"L'Agneau Mystique" des frères Van Eyck


En 1422-24, Jan van Eyck entre au service de Jean de Bavière, comte de Hollande, qui vit alors à La Haye. De 1425 à 1429, il se met au service de Philippe Le Bon, duc de Bourgogne, qui élèvera la Bourgogne au rang d'une des plus grandes puissances européennes et amorcera l'épanouissement de l'art flamand du XVème siècle. Outre ses fonctions de peintre de la Cour et de valet de chambre du Duc, il est également chargé de missions diplomatiques. C'est ainsi qu'il part en Espagne et au Portugal. En 1431, il s'installe définitivement à Bruges, s'y marie, y achète une maison dans laquelle il vivra jusqu'à la fin de sa vie, et où il deviendra peintre officiel de la ville. L'oeuvre de Van Eyck comprend des miniatures, des portraits et des tableaux religieux. Il a certainement commencé sa carrière comme enlumineur. On lui attribue ainsi les onze miniatures contenues dans le recueil dit "des Heures de Turin" aurait appartenu au duc de Berry dont une partie est conservée au Musée de Turin, tandis que le reste a été anéanti dans l'incendie qui détruisit la bibliothèque de la ville en 1804.
Quant aux tableaux, ils sont tous d'inspiration religieuse. Dans sa première oeuvre, "la Vierge et l'Enfant", 1433 (National Gallery, Melbourne), il découvre déjà une manière qu'il développera tout au long de sa carrière, jusqu'à son dernier tableau daté, "la Vierge à la Fontaine", 1439 (Kunstmuseum, Anvers). Ses Vierges sont de jeunes flamandes dont il ne cherche pas à idéaliser les traits; la tête de la Vierge, parfois ceinte d'une couronne, n'est jamais éclairée d'un nimbe. Les personnages qui peuvent les entourer sont copiés d'après nature, et le souci de l'exactitude se retrouve dans les moindres accessoires. Au fond se développent souvent des paysages pittoresques, exécutés avec une merveilleuse finesse. "La Vierge du Chevalier Rolin, (Musée du Louvre, Paris) peint en 1426 ou 1434, selon les différentes opinions avancées, pour Nicolas Rolin, chancelier de Bourgogne, s'ouvre sur  un jardin fleuri qui introduit un paysage aussi touffu que détaillé, réalisant ainsi un parfait équilibre entre l'espace intérieur et extérieur.
"La Vierge du Chancelier Rolin"

Van Eyck innove également dans l'art du portrait. Pour la première fois il peint son modèle vu de trois-quarts, le demi  corps remplace le buste. Tous ces portraits, de petits formats, font preuve d'une grande minutie et laissent autant voir les qualités que les défauts du sujet. "L'Homme à l'œillet " (Staatliche Museen, Berlin) est prodigieux de vérité, malgrè un peu de sécheresse, "l'Homme au Turban rouge", signé et daté 1433 (National Gallery, Londres), tourne pour la première fois son regard vers le spectateur.
Le double "Portrait en pied d'Arnolfini et de son épouse Giovanna Cenani", 1434 (National Gallery, Londres), l'une des rares oeuvres datées et signées, est un pur chef-d'oeuvre. Chaque détail est représenté avec un réalisme saisissant. Jamais aucun artiste n'a réussi à rendre la douceur et la chaleur d'une fourrure. Jamais aucune robe verte n'a atteint une telle intensité dans le coloris. Et par le jeu d'un miroir habilement accroché sur le mur, entre les deux époux, on peut apercevoir deux personnes dont l'une pourrait bien être Jan van Eyck lui-même.
Van Eyck est le premier peintre à faire le portrait de gens simples n'appartenant ni à la noblesse, ni à l'aristocratie d'Eglise. Dans ce domaine encore, il anticipe de deux siècles sur les préoccupations des peintres hollandais. Toutefois, le chef-d'oeuvre reste "l'Agneau Mystique" commandé par l'échevin de Gand, Josse Vyd, polyptyque constitué de douze panneaux en chêne dont les huit panneaux extérieurs sont peints des deux côtés. Produit incomparable d'une esthétique imprégnée de foi chrétienne, le thème a été inspiré de la liturgie de la Toussaint, plus spécialement par un passage de l'Epître de ce jour, tirée de "l'Apocalypse de Saint Jean "(VII, 1-17). Ce tableau, dans lequel s'affirment d'emblée le réalisme et l'idéalisme flamand se signale par ses très grandes qualités picturales: sérieux des figures, richesse des vêtements, variété du décor, luxe incomparable du coloris. Le réalisme s'affirme dans les figures humaines, dans le rendu des étoffes et des bijoux, dans le détail des plantes et des fleurs, Van Eyck n'a eu aucun successeur direct dans l'art hollandais, à l'exception de Petrus Christus dont on ne peut affirmer qu'il ait été son élève. Pourtant toutes les générations suivantes s'enrichiront de son enseignement, que ce soit dans l'art du portrait, celui de la nature morte ou encore du paysage.


Hugo van der Goes (1440-1482, né à Gand et mort à Auderghem (Belgique)

Huygue van der Goes, latinisé en Hugo van der Goes est un peintre flamand des Pays-Bas bourguignons. Il fait partie des peintres flamands les plus importants et innovants de la fin du XVᵉ siècle. Il est né à Gand et devient membre de la guilde des peintres de cette ville et y est nommé doyen en 1474.
Il exerce à Gand une activité variée: il peint l'écusson du pape sur les portes de la ville, dessine les vitraux de l'église Saint-Jean et exécute avec Memling et Bouts, les tentures et les décorations destinées à figurer à Bruges en 1468 au mariage de Charles le Téméraire et de Margaret York. En 1475, il devient frère convers au monastère augustin de Rouge-Cloître d'Auderghem, près de Bruxelles. C'est là qu'il meurt, victime de crises de démence, au retour d'un voyage à Cologne.
Son chef-d'oeuvre est, sans conteste, le tableau qui lui a été commandé par Tommaso Portinari, agent des Médicis à Bruges et descendant direct, dit-on, de Foulques Portinari, le père de la Béatrice de Dante. La famille a sa chapelle dans l'église Sant 'Egidio à Florence et c('est pour orner cet oratoire que Tommaso demande à Van der Goes
"Triptyque des Portinari"
de peindre un tableau en prenant comme thème les mots sacrés "Quem genuit adoravit". C'est ainsi que naît entre 1476 et 1478 le triptyque "l'Adoration des Bergers", connu sous le nom de "Triptyque des Portinari", qui, jusqu'au début du XXème siècle, a décoré la chapelle, avant de venir au Musée des Offices de Florence.

Ce tableau est un pur chef-d'oeuvre à plus d'un titre. Par la composition d'abord: toute sa force réside dans les antithèses tout à fait inédites dont il regorge: la Vierge faisant face à saint Joseph, le groupe des anges s'opposant à celui des bergers, la botte de foin contrastant avec les fleurs qui relèvent l'avant-plan. Pour l'invention: le coup  de maître est celui du trio des bergers, dessinés avec force et relief, et avec tout le réalisme, voire le naturalisme, qui convient à des gens simples. On est loin des figures doucereuses peintes à cette époque. Quant au paysage, nul peintre avant lui n'a osé donner comme arrière-fond à la scène autre chose qu'un paysage printanier. Grandeur, force expressive, sens de la nature et de l'espace, profond sentiment religieux, réalisme au coloris vigoureux, dessin sévère et précis, telles sont les qualités de ce triptyque qui, envoyé directement en Italie, n'exerça aucune influence sur la peinture des Pays-Bas. Par contre, il fit sensation chez les artistes italiens, et il est certain que Ghirlandaio s'en servit pour modèle.
Parmi les autres oeuvres de Van der Goes, il convient de citer "la Vierge et l'Enfant" en plusieurs versions aux Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles, à Philadelphie et à Francfort, "Le Péché originel", vers 1470 (Kunsthistorisches Museum, Vienne). Toutes ces toiles s'illustrent des grandes qualités dramatiques qui caractérisent "le Triptyque des Portinari" sans toutefois avoir la même envergure. Toutes sont cependant marquées de la manière du grand peintre flamand qui a exercé une grande influence non seulement sur son pays, mais également sur l'art en Allemagne et en Italie.


Quentin Metsys ou Massys (1466-1530, né à Louvain et mort à Anvers(Belgique)

"Le Prêteur et sa femme"
Quentin Metsys (né en 1466 à Anvers ou à Louvain, mort en 1530 à Anvers le ) est un peintre flamand. Son prénom et son nom sont orthographiés de plusieurs manières : Quinten ou KwintenMassysMetsys ou encore Matsijs.
Bien que l'apprentissage auprès d'un maître soit la norme à cette époque, aucune certitude ne permet d'affirmer que Quentin Metsys fut formé par Dirk Bouts. Fils d'un ferronnier, il apprend d'abord ce métier où il excelle, comme en témoigne la grille qui décore le puits du parvis Notre-Dame à Anvers. Vers 1490, il s'installe dans cette ville en qualité de peintre et fonde l'école d'Anvers qui ne tarde pas à supplanter celle de Bruges. On retrouve parfois dans ses tableaux religieux l'allure de l'ancienne école: "la Vierge à l'Enfant", 1485-90 (Musée royaux des Beaux-Arts, Bruxelles), reste encore très gothique. Cependant dans son vase triptyque, "l'Ensevelissement du Christ", conservé au Musée royal bdes Beaux-Arts d'Anvers, peint en 1508-1511 pour les menuisiers d'Anvers, considéré comme son chef-d'oeuvre, il sait unir une étonnante force d'expression à une puissante rféalité. La composition, l'aspect décoratif parfois surabondant, relèvent des principes de la Renaissance auxquels Metsys se montre sensible. Il convient de noter aussi son goût caractérisé pour l'orfèvrerie, les joyaux, les verreries et les miroirs où se reflète l'ambiance. "Le Prêteur et sa femme", 1514 (Musée du Louvre, Paris), révèle son habileté à rendre les jeux de physionomie. "Le Couple mal assorti", 1510-1515 (Collection Pourtalès, Paris), a un caractère réaliste et satirique annonçant la scène de genre qui connaîtra son plein épanouissement au siècle suivant. 
La demeure de Metsys a été le rendez-vous d'érudits humanistes: "Erasme" surtout dont il a fait le portrait en 1517 (Galleria Nazionale d'Arte Antica, Rome) et Peter Gillis (Longford Castle) dont il réalise le portrait pour Sir Thomas More, leur ami commun. Par l'harmonie réalisée entre le modèle et les paysages, ces oeuvres appartiennent entièrement à la Renaissance.
Son art se situe entre la tradition gothique, le réalisme et le maniérisme de la Renaissance. Sur les douze enfants qu'il eut, deux furent peintres, Jan et Cornelis.


Roger van der Weyden (1400-1464, né à Tournai et mort à Bruxelles (Belgique)

ou Roger de la Pasture, fait son apprentissage chez Roger Campin, identifié au maître de Flémalle, dans l'atelier duquel il entre à partir de 1427. En 1432, l'année même où s'est exposé "l'Agneau mystique" des frères Van Eyck à Gand, il est élu maître de la corporation des peintres de sa ville natale. Son apprentissage terminé, il se fixe à Bruxelles et devient peintre de la ville en 1435. Il y peint quatre tableaux d'histoire pour la décoration de l'Hôtel de Ville, disparus aujourd'hui. Il est dit que des tapisseries conservées au musée de Berne ont été réalisées directement d'après ces toiles.
Conjointement il travaille pour des corporations et des couvents ainsi que pour Philippe le Bon. En 1450, Van der Weyden voyage en Italie, visite Rome et Ferrare, où il est au service de Lionello d'Este, ainsi que d'autres villes du nord de l'Italie. Les Sforza et les Médicis lui passent des commandes. De retour à Bruxelles, à la fin de la même année, il s'y fixe désormais et y travaille jusqu'à la fin de ses jours.
De ce voyage, il garde l'influence italienne, principalement celle de Fra Angelico et de Gentile da Fabriano. Il adoucit sa vision et son style: "La Descente de Croix", vers 1435 (Musée du Prado, Madrid), ou encore "Le Retable Bladelin" (Staatliche Museen, Berlin) commandée en 1460 pour l'église de Middelbourg qui est le chef-d'oeuvre de ses dernières années et représente la synthèse de toutes ses recherches: dans le panneau central, le donateur rivalise de caractère avec les meilleurs portraits de Van Eyck, et "la Vierge qui adore l'Enfant" offre un mélange indicible de grandeur, de grâce et de tendresse. 
"Le Jugement Dernier"

"Le Jugement Dernier", vers 1450, (Hôtel-Dieu, Beaune), l'un de ses ouvrages les plus importants exécuté pour Nicolas Rolin, chancelier de Bourgogne, qui avait commandé à Van Eyck, "la Madone du Louvre", laisse aussi percevoir de même que par sa conception picturale, vers 1452, une influence italienne. Il a peint aussi "le Triptyque Braque" (Musée du Louvre, Paris) peint pour Catherine de Brabant, veuve de Jan Braque, "la Madone des Médicis (Städelsches Kunstinstitut, Francfort) et "la Mise au Tombeau" (Musée des Offices, Florence).
Roger Van der Weyden reste le meilleur exemple de ce qui peut résulter des contacts entre le nord et le sud de l'Europe: l'Italie n'a de cesse de ressusciter l'esprit classique, et les Pays-Bas ne sont pas parvenus, de longtemps, à se dégager de leur humanisme gothique pour adopter le style classique de la Renaissance italienne.
Van der Weyden ne s'est jamais départi de l'influence de son maître Van Eyck; toute sa vie, il est resté un réaliste convaincu.
Il est le premier parmi les Flamands à être sensible à la souffrance. Il se révèle le peintre par excellence des sentiments pathétiques, les interprétant avec le maximum de tension dramatique. Il faudrait remonter jusqu'à Giotto pour trouver quelque chose de comparable au geste de  douleur de la mère prenant son fils à bras le corps dans "le Retable des Miraflores (Staatliche Museen, Berlin) donné en 1445 aux Chartreux de Miraflorès par le roi Jean II d'Espagne. Le panneau central, "la Mise au Tombeau", suffirait à assurer la renommée de Van der Weyden.
Cependant, s'il est un narrateur incomparable de la souffrance et de la douleur, il sait traduire le bonheur serein et la joie intérieure en s'inspirant de la figure de la Vierge. Le génie de Van der Weyden, moins ambitieux dans l'originalité et l'invention que celui de Van Eyck, s'est révélé pleinement dans les bois peints de "La Vierge et l'Enfant". Les vierges de Van Eyck sont des jeunes filles enveloppées  d'amples manteaux rouges qui se promènent à l'intérieur des cathédrales quand elles ne sont pas assises sur un trône de pierre grise. Celles de Van der Weyden sont des femmes couvertes, tout au plus, d'un voile transparent. Il ne faut pas oublier que Van der Weyden, peintre en titre de la cour de Bourgogne a vu défiler dans son atelier les personnages les plus illustres qu'il a portraiturés. Parmi ceux-ci: Charles le Téméraire (Staatliche Museen, Berlin) Philippe de Croy (Musée royal des Beaux-Arts, Anvers). Cette galerie de portraits trahit, à n'en pas douter, le fin portraitiste qui sait mettre à nu la psychologie des personnages posant devant lui.
Ce maître cde l'école brabançonne a compté de nombreux disciples: deux de ses fils, tout d'abord, et Martin Schongauer, le plus grand peintre allemand de la seconde moitié du XVème siècle. En Flandre, Bouts et Memling, en Italie, Cosmè Tura et del  Cossa, s'en sont inspirés. 
Son influence s'est également étendue dans un autre domaine. On sait qu'il a été employé, selon l'usage, à mettre en couleur des statues et des bas-reliefs.
Pendant près de cinquante ans, de nombreux sculpteurs l'ont imité fidèlement, au point de reproduire l'arrangement de ses compositions et les types même de ses figures.

FRANCE

En France, dès le XIVème siècle, l'art gothique s'est altéré. L'art français n'est certes pas épuisé, il se transforme. Quand on cherche à en dégager les caractères, on y surprend souvent les mêmes tendances qu'en Flandre. C'est à ce pays, non à l'Italie, qu'il est alors apparenté; aussi l'influence flamande pénètre-t'elle facilement. Les ducs de Bourgogne attirent à Dijon des artistes de leurs villes flamandes: telle est l'origine de presque tous ceux qu'ils emploient à la Chartreuse située près de cette ville. Parmi eux, Claus Sluter, qui à la fin du XIVème siècle et au commencement du XVème, exécute "le Puits de Moïse", "le Tombeau de Philippe le Hardi";
Le Puits de Moïse- Claus Sluter

il est le maître d'une véritable école dijonnaise qui se maintient jusqu'au milieu du XVème siècle. A la cour de Charles V, on trouve des peintres et des sculpteurs flamands: Hennequin de
Liège, Jean de Bruges, André Beauneveu de Valenciennes, qui travaillent aussi pour les ducs d'Anjou, de Berry, d'Orléans. Plus tard, l'ex-roi de Naples, le bon René, qui lui-même se mêle de peindre, est en relation avec l'Italie et en fait venir quelques artistes; mais, en peinture, ses préférences vont à l'école flamande.
La cour bourguignonne de Dijon disparue, il reste en France trois centres d'art: la Touraine, la Provence, le Bourbonnais.
Le Tourangeau Jean Fouquet (1420-1480) est le premier peintre français qui ait atteint une renommée internationale. Alors qu'il est employé au service de Charles VII et de Louis XI, on vante son mérite en Italie où il est appelé pour exécuter le portrait du pape Eugène IV. Les miniatures des manuscrits qu'il enlumine tels que "Le Livre d'Heures d'Etienne Chevalier" conservé à la Bibliothèque nationale, au Louvre et à Chantilly, ou "Le Décaméron de Boccace", à la Bibliothèque d'Etat de Munich, demeurent de véritables tableaux dans lesquels figurent de nombreux personnages. Par le style, le coloris, le goût du portrait, Fouquet se rattache à l'école flamande. Il y joint cependant un souci d'élégance et de la grâce typiquement français. A l'Italie, il emprunte surtout des encadrements d'architecturez et des détails d'incantation.
Le premier chef-d'oeuvre provençal: "le tryptique de l'Annonciation" commandé par l'église Saint-Sauveur d'Aix par Pierre Courty (1443-1445) best anonyme. Son auteur s'affirme en grand maître de la peinture flamande en unissant la technique flamande à la lumière méridionale. Sa présence en Provence a peut-être permis la formation d'Enguerrand Quarton ou Charonton, connu de 1444 à 1466, qui a peint, dans une palette suave, "le Couronnement de la Vierge" pour la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon. On attribue "la Pietà d'Avignon" à l'un de ses collaborateurs, Pierre Villatte. Cependant le plus grand héritier de Quarton est sans nul doute Nicolas Froment (1425-1486), auteur du "Triptyque 
La Chartreuse- Villeneuve-lès-Avignon
du Buisson Ardent", commandé par René d'Anjou pour l'église des Grands Carmes. Sous une manière encore très flamande, il laisse filtrer quelques influences italiennes, notamment dans le traitement du paysage. Son ouvrage, "Le Livre des Tournois", dédié à Jean II de Bourbon a été illustré par le meilleur peintre de sa génération, le Maître de Moulins, demeuré anonyme, actif vers 1480.
Sous Charles VIII et Louis XII, il convient de citer deux artistes surtout, tous deux attachés au service du roi: Jean Bourdichon et Jean Perréal. De Bourdichon et Jean Perréal. De Bourdichon (1457-1521), il nous reste une oeuvre fort belle, "Les Grandes heures d'Anne de Bretagne (Bibliothèque nationale). Déjà s'y manifeste l'influence italienne. De son côté, Perréal (1460-1530), qui a visité plusieurs fois l'Italie, déclare, au retour d'un de ses voyages, modifier ses esquisses d'après les "choses antiques" qu'il a vues là-bas. Mais on ne possède aucun tableau qui puisse lui être attribué avec certitude et sa biographie est mieux connue que son style.


Les Grands Maîtres Français

Jean Bourdichon (1457-1521, né et mort à Tours)

Enluminure de J. Bourdichon
Bourdichon a probablement été formé dans l'atelier de Jean Fouquet. Il a servi trois rois: à vingt et un ans, il travaille pour Louis XI. Devenu peintre de la cour, il réalise le portrait de Charles VIII et de la Reine, puis celui de Louis XII. Il conserve encore son audience sous François 1er. C'est le peintre d'un grand nombre de tableaux, d'armoiries, de blasons et de monnaies, mais son oeuvre principale reste celle d'un enlumineur. Entre 1500-1507, il illustre le livre des "Grandes heures d'Anne de Bretagne" (Bibliothèque nationale, Paris), dans lesquelles cinquante et une enluminures, réalisées dans un coloris aussi riche que délicat, représentent des scènes de l'Evangile et de la Légende dorée. Le dessin en est très sûr.
De nombreux autres manuscrits enluminés par Bourdichon  sont conservés dans les bibliothèques d'Innsbruck, Londres, New York, Modène, et surtout Paris. Parmi ceux-là, il faut citer "les Heures de Ferdinand d'Aragon" et celles de "Charles d'Angoulême".
Il reste un représentant du style gothique international.



Jean Fouquet (1420-1481, né et mort à Tours)

Jean Fouquet, né vers 1420, peut-être à Tours, et mort entre 1478 et 1481, probablement dans la même ville, est considéré comme l'un des plus grands peintres de la première Renaissance et le rénovateur de la peinture française du XVᵉ siècle.
"La Vierge à l'Enfant"
On connaît peu de choses de ce peintre qui est pourtant le plus représentatif et le plus caractéristique de l'art français du XVème siècle. Probablement fils naturel d'uin ecclésiastique, il semble avoir séjourné à Rome avant 1447, comme en atteste son portrait du Pape Eugène IV accompagné de ses deux neveux. De retour à Tours, il ouvre un atelier, décore Notre-Dame-La-Riche et travaille à la cour de Charles VII dont il pêint le portrait en 1444 (Musée du Louvre, Paris). Sans être pour autant le peintre officiel, il ,peint les personnages importants: "Portrait de Guillaume Juvénal des Ursins", vers 1455 (également au Louvre), "Portrait d'Etienne Chevalier", trésorier de France" (Staatliche Museen, Berlin), "la Vierge à l'Enfant" (Musée royal des Beaux-Arts d'Anvers) peinte d'après les traits d'Agnès Sorel, la maîtresse de Charles VII.
Cette oeuvre figure parmi les plus belles pièces du XVème siècle. Elle frappe par son coloris étrange, le violent contraste de l'arrière-fond des chérubins et des séraphins rouges et bleus, et la figure même de la Vierge dont les formes blanches et sculpturales se détachent de la surface plane qui les porte. En 1461, à la mort de Charles VII, l'importance de Fouquet grandit. Il apparaît alors comme le chroniqueur de la cour, chargé de représenter les cérémonies, fêtes et et entrées. Entre 1470 et 1476, il réalise la seule oeuvre qu'on puisse lui attribuer avec certitude, le manuscrit enluminé des "Antiquités judaïques "de Flavius Josèphe (Bibliothèque nationale, Paris) réalisé pour le duc de Nemours, Jacques d'Armagnac, dans lequel il témoigne de son grand art de rendre les effets de foule et de défilés. Aucun miniaturiste n'a, comme Jean Fouquet, le sens du paysage dont l'observation quasi scientifique, rendue dans une palette aux couleurs chatoyantes, fait oublier qu'il s'agit là de miniatures et non de tableaux.
On date des années 1450 "les Heures d'Etienne Chevalier" dont les quarante-trois feuillets retrouvés sur quarante-sept sont conservés au Louvre, à la Bibliothèque nationale et au musée Condé de Chantilly. Ce volume montre sa connaissance de l'art italien, assimilant les recherches de perspective de Masolino, d'Uccello et la sensibilité de Fra Angelico dont Fouquet peut avoir vu des fresques au Vatican, lors de son voyage à Rome. Sa description de nombreuses vues de Paris, tend à prouver que Jean Fouquet y a effectué sa formation.
"Les Grandes Chroniques de France (Bibliothèque nationale, Paris) et l'illustration du "Décaméron de Boccace" (Staatsbibliothek, Munich), montrent un changement de style important: ses compositions monumentales cèdent la place à une manière plus décorative. Il renonce à la perspective géométrique pour adopter une conception plus traditionnelle.
En 1475, Jean Fouquet est mentionné comme peintre officiel du roi. "La Pietà", conservée dans l'église provinciale de Nouans, en Indre-et-Loire, est considérée comme sa dernière oeuvre. Elle est l'aboutissement d'une recherche de style où la spiritualité médiévale s'exprime dans toute son intériorité au sein d'une conception nouvelle et sereine de l'espace.
On connaît précisément la date du décès de Fouquet par un ace paroissial. Il meurt à Tours le 8 novembre 1481, après avoir été le premier peintre non italien du XVème siècle à avoir assimilé les principes de la peinture de la Renaissance. S'il n'a pas vraiment eu d'élèves, Fouquet a exercé une influence considérable sur l'évolution de la peinture française. Oublié dès sa mort, il sera redécouvert au XVIIème siècle.


Nicolas Froment (1425-1486, né à Uzès et mort à  Avignon)

"La Résurrection de Lazare"
Formé vraisemblablement dans le Nord, Nicolas Froment appartient à la deuxième école d'Avignon. En 1488, installé à Avignon, peintre à la cour de René 1er, duc d'Anjou et de Lorraine, roi de Naples, il est l'auteur d'un diptyque conservé au Louvre, "Portrait du roi René et Portrait de Jeanne de Laval, son épouse". Coloriste éclatant et remarquable portraitiste, il subit deux influences, la florentine et la flamande. La première se révèle dans l'art de traiter la perspective, la seconde dans son naturalisme. Parmi de nombreux travaux, deux lui sont attribués avec certitude. Il s'agit du triptyque de la "Résurrection de Lazare", signé au dos et daté de 1461 (Musée ders Offices, Florence), et du triptyque du "Buisson Ardent", commandé par le roi René et exécuté entre 1475 et 1476, pour l'église des Grands Carmes (Cathédrale d'Aix-en-Provence). 
Le premier, naturaliste, abondant de détails, dénote l'influence flamande et hollandaise, mais laisse transparaître cepêndant, notamment dans le traité du paysage, une connotation italienne. Le second, symbole de la Vierge qui conçoit sans être touchée par le feu de la concupiscence, gothique dans sa conception mais plus encore dans sa forme, traite avec des techniques et en un style empruntés à la Flandre et à la Toscane, un authentique paysage provençal. Froment a été à la tête d'un atelier actif.


Jean Hey ou Hay, dit le Maître de Moulins (1455-1505,)

Jean Hey, également connu comme Jean Hay et, d'après une hypothèse aujourd'hui la plus couramment admise, comme le Maître de Moulins, est un peintre, dessinateur de cartons et enlumineur français actif entre 1475 et 1505.
L'auteur du triptyque, "la Vierge à l'Enfant entourée d'anges", de la cathédrale de Moulins, exécuté vers 1498, n'a pu être identifiée. L'oeuvre a en fait été attribuée à de nombreux peintres, tels que Jean Perréal ou Jean Bourdichon. Mais quel que soit son nom, il est manifeste que, malgrè le souci du détail et de l'exécution maîtresse qui l'apparente à l'art flamand, l'art du Maître de Moulins reste typiquement français par la composition ample et simple, le goût de la forme construite, l'équilibre entre réalisme et sauvegarde de l'intériorité.
"la Vierge à l'Enfant entourée d'anges"

On attribue d'autres oeuvres au Maître de Moulins. Parmi celles-ci: "la Nativité du Cardinal Rolin", la plus ancienne, peintre vers 1480-1483, conservée au Musée des Beaux-Arts d'Autun; une "Vierge à l'Enfant entourée d'Anges", vers 1490-1495 (Musée royaux des Beaux-Arts, Bruxelles) ou encore sa dernière oeuvre, "Saint Maurice avec donateur" réalisée vers 1500 (Art Gallery, Glasgow) et représentant vraisemblablement François de Chateaubriant. On pense qu'il a surtout travaillé pour les Bourbons à Moulins. Il a réalisé certains portraits; celui du "Cardinal Charles II de Bourbon", vers 1483-1485 (Alte Pinakothek, Munich), celui du fils de Charles VIII, "Charles-Orland", vers 1494 (Musée du Louvre, Paris) et "une Enfant en prière", vers 1492-1493, qui pourrait bien être Marguerite d'Autriche, fille de l'empereur Maximilien.
Le Maître de Moulins est considéré comme l'un des meilleurs peintres de la fin du XVème siècle, dernier représentant de la peinture gothique.


Enguerrand Quarton ou Charonton (1410-1462, né à Laon et mort à Avignon)

Enguerrand Quarton (diocèse de Laon, vers 1410/1415 - documenté à Avignon entre 1444 et 1466) est un peintre, verrier et enlumineur français du Moyen Âge tardif, dont quelques œuvres sont parmi les premiers chefs-d'œuvre du XVème siècle et tranchent avec la peinture italienne ou flamande. Il est à ce titre l'un des plus représentatifs de la seconde école de peinture d'Avignon.
Il travaille tout d'abord à Aix-en-Provence, avant de s'installer, à partir de 1447, à Villeneuve-lès-Avignon. On lui connaît deux chefs-d'oeuvre. Le premier est "la Vierge de Miséricorde", l'un des premiers retables exécuté en 1452 en collaboration avec Pierre Villatte pour la Chapelle Saint-Pierre de Luxembourg à Avignon (Musée Condé, Chantilly). Cette oeuvre accuse des influences catalanes sans exclure celles de l'Italie contemporaine, principalement celle de l'école de Sienne. Bien que cetyte manière n'ait plus cours, Enguerrand Quarton peint la Vierge sur un fond or. Le deuxième chef-d'oeuvre est "le Couronnement de la Vierge", peint deux ans plus tard, en 1454, destiné à l'église des Chartreux de Villeneuve-lès-Avignon (Musée de l'Hospice, Villeneuve-lès-Avignon), dont on possède encore le contrat de commandes dans lequel le sujet est décrit avec précision. Ce retable relève d'une magistrale maîtrise dans la composition.
"le Couronnement de la Vierge"

Certains historiens d'art attribuent à Enguerrand Quarton 3la Pietà d'Avignon", peinte vers 1454-1456 (Musée du Louvre, Paris), probablement exécutée pour la Chartreuse de Villeneuve.
Influencée par la tradition et la sculpture française monumentalme et par l'enluminure gothique, l'oeuvre de Quarton est une synthèse parfaite de l'art du XVème siècle français dont l'artiste se révèle avec Jean Fouquet, une figure maîtresse.




Jean Perréal (1460-1528,)

Jean Perréal (dit Jean de Paris), est un peintre français né vers 1455 ou 1460 et mort vers 1528. Certains historiens de l'art l'identifient au Maître de Moulins.  Organisateur d'entrées solennelles, architecte de plusieurs monuments, poète, Jean Perréal est surtout célèbre pour être un peintre officiel des rois Charles VIII, Louis XII et François Ier. Son œuvre se situe à la charnière entre la fin du Moyen Âge et l'essor de la Renaissance. Ayant fait un voyage en Italie en accompagnant à plusieurs reprises, Louis XII autour de l'an 1500, il peint des portraits novateurs qui inspirent Corneille de Lyon ou Jean Clouet. De 1500 à 1506, il est le conseiller artistique de Marguerite d'Autriche qui lui commande plusieurs travaux. Pour elle, il décore l'église de Brou, dessine le tombeau de Philibert II de Savoie, son mari, et de Marguerite de Bourbon, sa belle-mère.

Jean Perréal également des manuscrits; on lui connaît trois portraits à l'enluminure: "Charles VIII, et d'Anne de Bretagne"  (Bibliothèque nationale, Paris et British Museum, Londres) et celui de "Pierre Sala", écuyer de Charles VIII (British Museum, Londres).

Jean Perréal a été longtemps oublié et sa redécouverte à l'époque contemporaine a d'abord été faite par les textes. L'établissement du corpus de ses œuvres n'a commencé de façon certaine qu'en 1963 et se poursuit encore.


Remerciements à: Encyclopédie de la Peinture (D. Spiess- Edita)

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